Partie 1 - Préparation de la formation

Le pilote qui envisage d'obtenir une qualification sur hydravion n'a qu'à regarder une carte du Canada pour voir le monde qu'il est sur le point de découvrir. On y trouve toutes sortes de plans d'eau qu'on appelle lac, rivière, chenal, détroit, embouchure, baie, bief, havre, bras et ainsi de suite. Et au-delà de la géographie, il y a l'histoire. En effet, la plus grande partie de l'histoire de l'aviation canadienne, et de celle de nombreuses collectivités, a été écrite grâce aux hydravions. Un bon pilote d'hydravion apprend à respecter la géographie. Toutefois, sa formation serait incomplète sans une certaine appréciation de l'histoire.

La qualification

La qualification sur hydravion ne vise que le pilote qui est déjà titulaire d'une licence. En principe, c'est assez simple puisqu'il suffit de convertir un pilote chevronné dans un élément (sur terre) vers un nouvel élément (sur l'eau). En réalité, ce n'est pas si simple, et les instructeurs ne devraient pas oublier certains points. D'abord, si le pilote a un niveau de compétence peu élevé, s'il n'a pas tenu ses compétences à jour sur avion terrestre, ou s'il a laissé ses compétences s'atténuer depuis le dernier test en vol, il aura de la difficulté à obtenir sa qualification sur hydravion dans le temps minimum. Ensuite, si le pilote désire se servir de la qualification au niveau de pilote professionnel, il voudra prolonger sa formation pour parfaire ses compétences et acquérir de l'expérience dans diverses situations et, sans doute, sur certains types d'hydravions commerciaux. Un instructeur peut l'aider à y parvenir, mais il lui faudra consacrer plus de temps. Finalement, le pilote d'un hydravion doit posséder une capacité supérieure de jugement. Cela ne signifie pas qu'un pilote d'avion terrestre ne doit pas en posséder autant, au contraire. Cependant, l'exploitation d'un hydravion est nettement différente. Elle se déroule loin des ressources qu'un pilote d'avion terrestre prend pour acquise, par exemple, les services de météorologie, de planification des vols, de ravitaillement en carburant et de la circulation aérienne. En outre, piloter un appareil sur l'eau exige plus d'habiletés que piloter un avion sur terre.

Formation au sol

Même si aucune formation au sol n'est obligatoire pour la qualification sur hydravion, plusieurs points qui seront soulevés à la rubrique « Connaissances de base essentielles » des exercices en vol peuvent être abordés au cours d'une séance de formation générale, avant le début des vols. Que cette formation soit donnée ou non, les connaissances de base essentielles en vue d'un exercice en vol doivent être assimilées avant le vol proprement dit. Voici certains sujets qui pourraient faire partie d'une séance de formation générale au sol :

  1. Aperçu du programme de formation — Donner un aperçu de la formation en vue de la qualification sur hydravion permet non seulement à l'élève de savoir ce qui l'attend mais aussi de savoir ce dont on s'attend de lui ou d'elle.
  2. Terminologie des hydravions — Ce sera sans doute la première fois que l'élève entendra les expressions : pont, cloison, taquet d'amarrage, quille, butoir, arête, crosse, redan, cale, gouvernail marin, barre d'écartement, et hauban.
  3. Consultation du Supplément hydroaérodromes.
  4. Utilisation du matériel tel que pompes pour flotteurs, gilets de sauvetage, trousses de survie, trousses de premier soins, ancres et cordes.
  5. Manière de déterminer les performances d'un hydravion.
  6. Hydrodynamique d'un hydravion.
  7. Priorité de passage sur l'eau.
  8. Procédures locales de circulation, et vol dans l'espace aérien à statut spécial.

Exercices en vol

Même si aucune section du présent guide n'est dédiée aux exercices en vol, cela ne signifie pas que la formation sur hydravion n'en comporte aucun. Certains exercices seront nécessaires. Il faudra, par exemple, laisser suffisamment de temps à l'élève pour voler en palier afin qu'il se familiarise avec les caractéristiques de vol au cours de manoeuvres normales. Ensuite, il faudra passer en revue certaines manoeuvres plus difficiles telles que les virages serrés et les décrochages. Puisque les options disponibles sur hydravion sont différentes et que les performances en vol plané d'un hydravion peuvent être très différentes de celles d'autres types d'avion que le pilote a pu piloter, il conviendra également d'aborder les amerrissages forcés et les pannes moteur après le décollage.

Avions amphibies

L'instructeur qui fait subir des tests en vol sur avion amphibie sait qu'il faut accorder une attention spéciale à ce type d'avion. En effet, ces appareils ont un train escamotable, et plus un avion est complexe, plus il faut tenir de facteurs en considération. Dans ce cas, il importe de surveiller de près les performances ainsi que la masse et le centrage de l'avion. L'utilisation d'une liste de vérifications est très importante (certains exploitants ont prévu des pages vertes pour les opérations sur terre et des pages bleues pour les opérations sur l'eau). Le pilote doit bien connaître les systèmes de bord, en particulier le train d'atterrissage et les procédures de sortie et de rentrée d'urgence de ce dernier.

Avantages

  • Si les plans d'eau sont trop agités ou sont gelés, l'avion amphibie peut se poser sur terre.
  • Puisque certains rivages sont rocailleux ou ne sont pas à l'abri du vent et des vagues, l'amarrage devient impossible, mais l'appareil pourrait se poser sur une surface d'atterrissage avoisinante.
  • L'avion amphibie peut facilement être mis à l'abri dans un hangar.
  • Puisque les opérations sur l'eau ne sont autorisées que pendant le jour, un avion amphibie peut décoller sur l'eau juste avant le crépuscule et se poser sur terre après son départ.
  • L'avion amphibie a accès à un plus grand nombre d'endroits pour se poser et à davantage d'installations d'entretien et de ravitaillement.

Inconvénients

  • Un train escamotable coûte cher, et son entretien est dispendieux.
  • La charge utile est normalement réduite de l'équivalent d'un ou de deux passagers.
  • La vitesse de l'avion est légèrement réduite.
  • Les primes d'assurance sont plus élévées puisque l'avion risque de se poser sur l'eau les roues sorties.
  • Dans le cas d'un avion à coque, le risque de marsouinage est plus élevé au décollage et à l'amerrissage.

Certains principes d'apprentissage

Il faut tenir compte de certains principes généraux d'apprentissage pendant n'importe quel type de formation, y compris la formation sur hydravion. Le Guide de l'instructeur de vol de Transports Canada est particulièrement utile, surtout la première section qui porte sur les principes pédagogiques et les techniques d'instruction. On y trouve une série de « facteurs d'apprentissage » que nous reproduisons ici afin d'insister sur leur importance dans la formation en vol.

L'élève doit être prêt à apprendre (préparation).

Dans une certaine mesure, ce principe rappelle à l'instructeur de surveiller le moindre signe d'inconfort ou de stress chez son élève, deux facteurs qui ont une incidence négative sur la formation. Dans ce cas, il est sans doute préférable de reporter la leçon. L'instructeur doit motiver l'élève en lui expliquant le déroulement du vol, pourquoi chaque exercice doit être maîtrisé, et comment ces exercices s'intègrent à l'ensemble du programme de formation en vue de la qualification. être prêt à apprendre présume également que l'élève possède les connaissances nécessaires pour entreprendre la leçon en vol (ou sur l'eau) afin d'en bénéficier au maximum. Par exemple, si l'instructeur envisage de montrer comment circuler sur le redan, l'élève doit comprendre la signification du terme « redan » avant de partir, ou s'il désire lui enseigner comment effectuer un amerrissage forcé, l'élève doit d'abord comprendre la procédure à suivre.

Enseigner correctement la première fois (primauté).

La première impression peut être très forte. Tant mieux si elle est bonne. Par conséquent, toute démonstration ou manoeuvre doit être exécutée avec le plus grand soin possible, compte tenu des conditions existantes. Toutefois, l'enseignement le plus important est en partie dispensé à l'extérieur du contexte d'une leçon officielle. La conduite de l'instructeur doit donc être exemplaire parce que la manière dont il pilote, qu'elle soit bonne ou mauvaise, influencera fortement l'élève. L'instructeur doit toujours se méfier du laisser-aller, surtout après avoir fait l'expérience d'un exercice ou d'une situation à plusieurs reprises, mais que l'élève aborde pour la première fois.

Passer du connu à l'inconnu, de simple à complexe, de facile à difficile (rapport).

L'élève qui désire obtenir une qualification sur hydravion possède déjà de nombreuses compétences, celle d'atterrir par exemple. L'instructeur peut donc fonder l'apprentissage de nouvelles compétences sur des plus anciennes. Il doit laisser à l'élève le temps de maîtriser les amerrissages normaux avant d'aborder des situations plus difficiles, telles que les amerrissages sur eau agitée ou par vent de travers. Il doit s'assurer que l'élève maîtrise parfaitement chaque élément d'un exercice avant d'essayer l'exercice au complet. Par exemple, l'élève aura de la difficulté à accoster s'il n'a pas appris à circuler à bas régime.

L'élève apprend mieux lorsqu'il participe à une activité utile (exercice).

L'instructeur doit planifier soigneusement ses leçons en vol pour que chaque heure de vol soit la plus efficace possible. Les leçons doivent prévoir du temps pour permettre à l'élève de se pratiquer à exécuter une tâche précise ou une partie d'une tâche donnée. Si cela est important au cours d'un vol en double commande, cela est également important pendant les vols en solo. Ces derniers ne servent pas uniquement à accumuler du temps de vol. C'est pourquoi l'instructeur doit s'assurer que l'élève comprend les tâches qu'il devra exécuter pendant ses vols en solo.

Les choses dramatiques ou réalistes sont celles dont on se rappelle longtemps (intensité).

La formation est plus efficace si elle contient des situations réalistes, à la condition que ces situations ne présentent aucun danger. Par exemple, dans la mesure du possible, l'instructeur ne doit pas simplement simuler un amerrissage sur un plan d'eau calme, mais en exécuter un pour de vrai. Il doit songer à toutes les situations auxquelles l'élève devra faire face après avoir obtenu sa qualification, et prendre toutes les mesures raisonnables pour l'y préparer.

L'élève doit se sentir satisfait d'avoir participé activement à la leçon (effet).

L'instructeur doit organiser sa leçon de manière à ce que l'élève ait une grande marge de manoeuvre pour progresser. Il doit le respecter et être courtois envers lui. Quand il évalue l'élève, il souligne les éléments positifs en premier, et il évite d'être pointilleux.

Ce qui a été appris ou pratiqué le plus récemment est ce dont on se rappelle le plus longtemps (rétention).

Un exposé prévol donné juste avant une leçon en vol peut aider l'élève à se souvenir des principaux points des exercices qu'il aura à effectuer. En vol, la révision de certains exercices déjà maîtrisés accentuera la progression de l'élève. Un bon exposé après vol permet d'évaluer les points forts et les faiblesses de l'élève, de répondre à ses questions et de suggérer des sujets d'étude pour la prochaine leçon.

Méthode d'apprentissage par démonstration et exécution

La méthode d'apprentissage par démonstration et exécution peut être subdivisée de diverses façons (le Guide de l'instructeur de vol la divise en cinq étapes principales). Il est toutefois sans doute plus simple d'aborder cette excellente méthode en quatre étapes fondamentales : expliquer, démontrer, imiter et évaluer.

Expliquer

L'instructeur prend les commandes pour expliquer brièvement les points essentiels de l'exercice. Pour que cette étape réussisse, l'élève doit avoir reçu toute formation au sol nécessaire avant le départ. Comme explication, l'instructeur se limite à dire à l'élève ce qu'il doit observer pendant la démonstration. Ce n'est pas le temps de donner de longues explications ni de poser des questions.

Démontrer

Pendant que l'élève suit aux commandes, l'instructeur exécute la démonstration le plus fidèlement possible en soulignant les détails importants à observer.

Imiter

L'instructeur laisse l'élève pratiquer tout en lui donnant suffisamment d'aide verbale pour éviter de graves erreurs. Il n'exerce aucune pression sur les commandes et il ne les reprend que s'il lui faut corriger de graves erreurs. Il remet ensuite les commandes à l'élève.

Évaluer

L'instructeur prend les commandes et souligne les points forts et les faiblesses de l'élève, et il lui suggère des moyens précis pour s'améliorer. Ce n'est pas le moment d'énoncer toutes les erreurs commises mais plutôt de mettre l'accent sur les plus importantes et de limiter l'évaluation à deux ou trois points principaux. Si l'instructeur ne peut rien suggérer de valable pour corriger une erreur, il est préférable de ne pas la mentionner.

Les mains sur les commandes

Pendant que l'instructeur enseigne une manoeuvre, l'élève peut suivre aux commandes, c'est-à-dire placer les mains et les pieds sur les commandes en exerçant une légère pression pour sentir les déplacements des commandes. Il ne sentira pas la pression exercée par l'instructeur, mais ce genre d'imitation peut l'aider. Pendant que l'élève est aux commandes, l'instructeur doit éviter d'exercer la moindre pression sur elles afin que l'élève apprenne à les solliciter convenablement. De la sorte, personne ne risquera de penser que c'est l'autre qui est aux commandes. Une exception à cette règle est cependant de mise pendant un amerrissage, car l'instructeur pourrait solliciter un peu plus les commandes, sans les prendre. Dans ce cas, l'élève doit être mis au courant.

Avant le transfert des commandes, l'élève et l'instructeur doivent savoir parfaitement à quoi s'attendre. Par exemple, si l'instructeur désire remettre les commandes à l'élève, il lui dit « tu as les commandes ». Le transfert n'est terminé que lorsque l'élève répond « j'ai les commandes ». En revanche, si l'instructeur souhaite prendre les commandes, il dit « j'ai les commandes » et l'élève répond « vous avez les commandes ».

Sensibilisation, attitude et discipline

Tout pilote doit se sensibiliser au milieu dans lequel il vole. Le pilote d'hydravion n'est pas différent à cet égard, sauf que le milieu dans lequel il évolue présente des défis bien particuliers. Quand il est seul dans la nature sauvage, il n'a accès pour ainsi dire à aucune ressource, sauf ses connaissances, ses compétences et son état d'esprit. Tous les pilotes, y compris les pilotes d'hydravion, doivent posséder les connaissances et les compétences nécessaires pour assumer leurs fonctions. À l'aide de leurs connaissances et de leurs compétences, ils doivent développer une excellente prise de conscience de la situation et être vigilants pour la maintenir. Ils doivent posséder une attitude qui valorise la sécurité et qui les pousse à agir en fonction de leur sensibilisation à la situation en cours. En outre, ils doivent posséder la discipline nécessaire pour affronter les situations et les pressions éventuelles. Si ces qualités sont absolument essentielles chez le pilote d'hydravion, il en est de même pour le pilote instructeur. Ce dernier doit donc avoir une conduite exemplaire et afficher constamment toutes ces qualités primordiales.

Recommandation en vue de la qualification

Avant de recommander un pilote pour la qualification hydravion, l'instructeur doit s'assurer que les normes de compétence établies dans le présent guide sont respectées. Les sujets obligatoires doivent avoir été abordés, et le pilote doit avoir démontré qu'il a les compétences nécessaires. À cet égard, l'instructeur est aussi l'examinateur de vol, même si la qualification sur hydravion n'exige aucun test en vol officiel. Quand l'instructeur recommande un pilote pour la qualification, il certifie qu'il a convenablement assumé ses fonctions. À la fin de la formation, l'instructeur devra aider l'élève à remplir la demande de qualification, soit le formulaire « Licence d'équipage de conduite — Demande d'annotation ».

Explication de certaines rubriques

Six rubriques sont utilisées pour regrouper l'information relative aux exercices en vol : Objectifs, Motivation, Connaissances de base essentielles, Conseils à l'instructeur, Leçon et exercices en vol, Normes de compétence.

Objectifs

Cette partie décrit les connaissances que l'élève devrait avoir acquis à la fin de la leçon.

Motivation

Cette partie explique pourquoi l'élève doit acquérir les compétences visées. L'instructeur doit s'assurer que l'élève comprend l'importance de la leçon et son insertion exacte dans l'ensemble du programme de formation.

Connaissances de base essentielles

Cette partie énonce les connaissances minimales requises pour que l'élève puisse profiter pleinement des leçons en vol. Il incombe à l'instructeur de s'assurer, entre autres, que l'élève a suivi toute la formation au sol pertinente avant de commencer la formation en vol.

Conseils à l'instructeur

Cette partie donne des renseignements susceptibles d'aider l'instructeur à présenter ou à donner une leçon.

Leçon et pratique de l'élève

Cette partie présente les étapes du déroulement de la leçon. Elle propose en outre des exercices qui aideront l'élève à développer les compétences nécessaires pour atteindre les objectifs de la leçon.

Normes de compétence

Aucun test en vol n'est prévu pour la qualification sur hydravion. Par contre, l'instructeur doit certifier que l'élève possède les compétences nécessaires pour obtenir la qualification. Afin de l'aider à évaluer les compétences de son élève, des normes ont été établies. L'élève doit pouvoir exécuter les exercices demandés conformément à ces normes, avant qu'il puisse être recommandé pour obtenir la qualification.