A17-02 - Désintégration en vol

A17-02 – « Le ministère des Transports, en collaboration avec l’industrie et les représentants des employés du secteur canadien de l’aviation, élabore et mette en place des exigences relativement à un programme global de lutte contre l’abus de drogues et d’alcool, y compris le dépistage, pour réduire le risque que des personnes aient les facultés affaiblies en assumant des fonctions liées à la sécurité. Ces exigences doivent prendre en compte et concilier la nécessité de respecter les principes des droits de la personne de la Loi canadienne sur les droits de la personne et la responsabilité de protéger la sécurité du public. »

Réponse de Transports Canada à la recommandation A17-02

Transports Canada (TC) donne son approbation en principe à la recommandation (A17-02).

La sécurité aérienne est de la plus haute importance pour TC. C’est pourquoi le Ministère s’engage à continuer de renforcer la sécurité aérienne en collaborant en consultation avec ses intervenants de l’industrie ainsi que ses partenaires internationaux afin de prévenir des cas de facultés affaiblies dans le secteur des transports et y remédier.

TC s’engage à perfectionner son programme de toxicomanie existant; des travaux ont été amorcés pour trouver des façons d’améliorer les mesures visant à déceler, à prévenir et à régler les problèmes de facultés affaiblies dans le secteur des transports. En plus de ce programme, TC se penchera davantage sur l’élaboration de mécanismes additionnels visant à protéger le public voyageur contre les personnes aux facultés affaiblies qui exercent des fonctions critiques pour la sécurité.

Conformément à la Loi sur l’aéronautique et au Règlement sur l’aviation canadien (RAC), le Canada impose des règles et des normes médicales strictes en ce qui concerne la consommation d’alcool et de drogues.

TC abordera cette recommandation dans le cadre des volets d’intervention suivants :

  • 1. Protocole sur la toxicomanie de Médecine aéronautique civile (MAC) de TC

    TC a un protocole médical fiable visant les troubles liés à la toxicomanie qui repose sur une évaluation médicale stricte et un processus de certification.

    Pour obtenir une licence de pilote, tous les candidats doivent d’abord obtenir un certificat médical émis par le ministre des Transports. Le processus commence avec un examen effectué par un médecin-examinateur de l’aviation civile (MEAC). Le MEAC effectue l’examen médical et prépare un rapport dans lequel il indique une recommandation concernant l’aptitude médicale. Ce rapport est ensuite transmis aux conseillers médicaux du ministre de la Direction générale de la médecine aéronautique civile de Transports Canada (MAC de TC). Ensuite, le MAC de TC évalue tous les rapports médicaux qui lui ont été soumis concernant le demandeur. Si le candidat satisfait à toutes les normes médicales pour la catégorie correspondant à la demande de certificat médical, un certificat médical lui est émis.

    L’identification des problèmes de consommation et d’abus de substances

    La Loi sur l’aéronautique oblige tous les médecins à signaler à TC les problèmes de santé qui pourraient compromettre la sécurité aérienne. Cette obligation de divulguer à l’organisme de réglementation constitue l’un des systèmes de rapports médicaux les plus fiables parmi les pays membres de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI).

    Ces exigences visant la création de rapports permettent à tous les professionnels médicaux de signaler à MAC de TC une préoccupation ou un problème de santé décelé. Une fois que MAC de TC a été informé, que ce soit par l’intermédiaire d’un examen du MEAC, d’un professionnel médical traitant, ou du demandeur même, le processus suivant doit être amorcé :

    1. La personne est informée et MAC de TC demande une évaluation médicale pour déterminer si elle a un trouble d’utilisation de substances pouvant être diagnostiqué ou s’il existe un cycle d’abus de substances intoxicantes et que le niveau de préoccupation est suffisamment élevé pour justifier un traitement médical.
    2. Si un diagnostic est posé ou si le niveau de préoccupation est suffisamment élevé, MAC de TC exige que des soins adéquats soient prodigués par un expert en matière de toxicomanie avec un suivi, ce qui représente souvent un traitement de 30 jours dans un établissement.
    3. MAC de TC évalue ensuite le degré de réussite du traitement selon l’avis de l’expert associé à l’établissement de traitement.
    4. Si le traitement est jugé fructueux, MAC de TC organise un suivi adéquat qui comprend une surveillance et une évaluation médicale continue (mensuelle initialement) et la participation à l’un des programmes de type Alcooliques anonymes (AA) (quotidienne initialement, puis hebdomadaire).
    5. Après avoir bien suivi ces étapes, réussi l’examen administré par l’équipe médicale, et accepté de suivre un traitement à long terme ainsi qu’un plan de surveillance, le pilote peut soumettre une demande visant à rétablir son certificat médical.
    6. Une fois que MAC de TC juge que le traitement suivi a été fructueux, que le programme de surveillance est suffisamment rigoureux et que le pilote s’y conforme, MAC peut recommander un certificat médical « avec copilote ou en tant que copilote » (c.-à-d., les personnes ayant suivi un traitement doivent toujours être accompagnées d’un autre pilote qualifié sur type) avec des conditions supplémentaires, notamment la conformité au traitement, la participation au programme AA ou programme similaire, le dépistage de drogue ou d’alcool sans préavis (trimestriel initialement), et l’abstinence absolue pendant au moins deux ans. Si la situation clinique le justifie, le dépistage peut être imposé pendant une période prolongée.

    Les pilotes employés par de grands transporteurs aériens peuvent avoir accès au programme Tri-partite, un comité de gestion de la supervision composé de médecins, de syndicats et un représentant de l’employeur. Ces programmes ont pour mandat de traiter les pilotes ayant un trouble lié à la toxicomanie afin de réduire les risques liés aux facultés affaiblies dans le secteur de l’aviation. TC en fait d’ailleurs partie depuis 1980; depuis, le modèle du programme a évolué pour devenir un protocole complet de gestion de l’abus de substances intoxicantes visant à aborder les besoins et les préoccupations de toutes les parties intéressées.

    L’approche Tri-partite est fondée sur un processus à trois volets :

    1. Identifier les personnes ayant un trouble lié à la toxicomanie;
    2. Diriger les personnes ayant un trouble vers un traitement et une réhabilitation par l’intermédiaire d’un PAE;
    3. Assurer une surveillance continue et un suivi.

    Après avoir identifié un cas de trouble lié à la toxicomanie, vous devez satisfaire aux exigences énoncées dans la liste ci-dessus; cependant, dans la mesure du possible, cela doit être réalisé en suivant le programme Tri-partite.

    Environ 90 pour cent des pilotes ayant un trouble lié à la toxicomanie ont pu reprendre leur travail dans le poste de pilotage après avoir suivi avec succès un traitement et un programme de gestion de leur trouble. Le protocole complet de TC visant l’abus de substances intoxicantes consiste à identifier, à traiter et à réintégrer les pilotes ayant un trouble lié à la toxicomanie.

    MAC de TC continue également d’offrir sa participation et son soutien aux efforts internationaux visant la promotion et la sensibilisation afin de réduire les risques liés aux facultés affaiblies dans le secteur de l’aviation, surtout par l’intermédiaire de l’OACI et d’autres groupes de travail internationaux; il assure également un suivi de toutes les activités mentionnées dans le but d’harmoniser les normes et les pratiques.

  • 2. Engagement continu de TC et collaboration avec l’industrie canadienne de l’aviation et avec les représentants des employés

    Pour s’assurer que les mesures de protection et les normes de sécurité continuent d’être efficaces, le ministre des Transports a transmis une lettre, au début janvier 2017, à toutes les lignes aériennes exploitées au Canada leur demandant de confirmer que leurs protocoles de sécurité sont à jour, y compris les mesures visant à confirmer que les pilotes sont aptes à voler. Les huit principales lignes aériennes canadiennes ont toutes confirmé qu’elles ont des protocoles de sécurité adéquats pour aborder des problèmes de consommation de drogue et d’alcool. Certains outils et certaines pratiques que les lignes aériennes ont adoptés sont : des politiques internes visant la consommation d’alcool et de drogue en milieu de travail; des documents de sensibilisation, et des manuels d’exploitation.

    De plus, le cadre de l’approche continue de TC visant à mobiliser les intervenants concernant les questions de sécurité, le Ministère a organisé l’atelier « Apte à voler » au début juin 2017; cet atelier a réuni un échantillon de plus de 200 intervenants représentant de l’industrie de l’aviation, y compris les syndicats de pilotes, NAV Canada, les associations de l’aviation, le personnel de l’aviation, les autres ministères fédéraux, et les professionnels de la santé. L’atelier avait pour but de faire la promotion de la culture de la sécurité aérienne dans le milieu aérien; d’accroître la sensibilisation à la santé mentale et à la toxicomanie; de fournir des renseignements sur les pratiques exemplaires et sur les programmes; et d’échanger des méthodes pratiques de promouvoir un effectif en santé.

    Lors de l’atelier « Apte à voler », TC a aussi entendu parler du rôle proactif que l’industrie et que les syndicats de pilotes doivent jouer pour aborder et remédier les problèmes de toxicomanie, y compris des programmes de soutien par les pairs et le PAE en milieu de travail. Par exemple, les grandes lignes aériennes canadiennes ont mis en œuvre un PAE pour aider leurs employés à aborder des problèmes d’aptitude mentale et de consommation d’alcool et de drogue. Ces programmes permettent de donner une référence à des professionnels de la santé spécialisés en thérapie, en traitement et en réhabilitation. De plus, la création de réseaux de soutien par les pairs (c.-à-d., regroupement de petits exploitants) ou l’établissement de programmes administrés par les associations de l’industrie pourrait appuyer les petits transporteurs aériens pour qu’ils aident leurs pilotes et leurs employés à composer avec des problèmes de toxicomanie. Puisque les PAE ne sont pas obligatoires et puisqu’il s’agit d’une initiative dirigée par l’industrie, le gouvernement n’a aucune norme réglementaire ni aucune directive.

    À l’automne 2018, TC lancera une campagne de sensibilisation à la toxicomanie en aviation. Celle-ci fera la promotion du bien-être des employés et de leurs pairs en tant que responsabilité partagée. Le rapport du SCT indique que certains employés se doutaient bien que le commandant de bord avait un problème de consommation d’alcool, mais personne n’a jamais mentionné sa préoccupation. La campagne visera à éduquer les membres du milieu de l’aviation de sorte qu’ils puissent reconnaître les symptômes des troubles liés à la toxicomanie et leur donnera des directives sur la façon de gérer un tel problème.

  • 3. Pratiques actuelles de mise à l’essai dans le secteur de l’aviation

    À l’heure actuelle, les exploitants peuvent imposer un dépistage d’alcool et de drogue aux membres d’équipage de conduite si des motifs raisonnables le justifient (« pour raison valable ») ainsi qu’après un accident ou un incident.

    Pour le moment, les titulaires de certificats médicaux canadiens (p. ex., les pilotes) ayant reçu un diagnostic de toxicomanie peuvent être assujettis à un dépistage de drogue et d’alcool sans préavis pour veiller à leur conformité aux dispositions en matière d’abstinence de leur certificat. Cela étant dit, la loi ne confère pas à TC le pouvoir d’obliger qu’un dépistage aléatoire soit imposé aux membres d’équipage de conduite en tant que mesure de contrôle. Pour obliger le dépistage aléatoire d’alcool ou de drogue, il faudra d’abord étudier la question plus attentivement, l’évaluer et présenter des justifications afin de trouver me moyen le plus efficace d’aborder les recommandations, tout en tenant compte des enjeux de protection de la vue privée ainsi que les lois et les principes dont la Loi canadienne sur les droits de la personne et la Charte canadienne des droits et libertés.

  • 4. Analyse continue des politiques de TC

    Transports Canada reconnaît que l’abus de substances intoxicantes est un problème pouvant nuire à tous les modes de transport, et c’est pourquoi il s’engage de façon proactive à élaborer des politiques sur les facultés affaiblies dans tous les modes – transport aérien, maritime et ferroviaire tout comme la sécurité automobile. Motivée en partie par les projets de loi C-45 et C-46, l’analyse des politiques tiendra compte de la prévalence de facultés affaiblies au travail et des répercussions; des démarches que suivent les autres pays; des enjeux liés à la vie privée; des enjeux liés aux droits de la personne dans le contexte de la Charte canadienne des droits de la personne (et des lois connexes); des normes de santé et de sécurité en milieu de travail pour les employeurs et les employés pour ce qui est des facultés affaiblies sous l’égide d’Emploi et Développement social Canada; et de la capacité des secteurs du réseau des transports à assumer les coûts des nouvelles obligations. Toute nouvelle exigence visant un programme complet pour composer avec les troubles de toxicomanie devra tenir compte, dans l’analyse des politiques, de tous les points à considérer ainsi que de la question plus globale de la sécurité dans le réseau des transports du Canada.

    Dans le secteur de l’aviation en particulier, TC étudie la possibilité de suivre des approches axées sur les politiques, la réglementation et l’application de la loi pour élaborer des mesures de dissuasion et de prévention à l’intention des membres d’équipage de conduite qui se présentent au travail avec des facultés affaiblies. Ces approches comprennent l’examen de la limite d’alcoolémie, le dépistage avant l’emploi, le dépistage aléatoire obligatoire dans le cadre du Programme d’aide aux employés (PAE), et dans le cas de postes critiques pour la sécurité, l’augmentation de l’intervalle de temps entre la consommation d’alcool et le début du service. En outre, par suite de l’atelier « Apte à voler » et de son travail initial en matière de politiques, TC aimerait que les employeurs jouent un rôle plus important dans la création de régimes d’essai et dans la mise sur pied de PAE à l’intention des employés qui exercent des fonctions critiques pour la sécurité. TC reconnaît qu’il s’agit là d’enjeux complexes. Il s’engage donc à mobiliser ses intervenants afin de mieux comprendre les défis que représentent ces enjeux pour le secteur de la sécurité aérienne et afin de mettre sur pied des programmes efficaces.

    TC procède également à un examen afin de déterminer si la réglementation actuelle convient pour empêcher que des membres d’équipage de conduite viennent à se présenter au travail avec des facultés affaiblies. De plus, TC s’efforce d’améliorer les mesures de dissuasion en :

    • modifiant la règle actuelle dite « des canettes aux manettes » de 8 heures à 12 heures et interdisant aux membres d’équipage de conduite de travailler pendant cet intervalle après avoir consommé une boisson alcoolisée (initiative est en cours d’élaboration dans le cadre du dossier sur la fatigue);
    • prescrivant une limite d’alcoolémie qui cadre avec la réglementation de ses homologues internationaux;
    • mettant en œuvre des approches plus strictes visant les mesures punitives et d’application de la loi à l’intention des personnes qui essaient délibérément de tromper le système.

    Cette analyse approfondie, dont l’achèvement est prévu pour l’automne 2018, permettra d’orienter l’élaboration de politiques sur les facultés affaiblies afin de réduire le risque que des membres d’équipage occupant des postes critiques pour la sécurité viennent à se présenter au travail avec des facultés affaiblies.