Ligne directrice de la sécurité des aérodromes (ASD) N° 2003-009

ASD 2003-009:
2003.10.15

Sujet

Certification d’un aérodrome fondée sur des raisons d’« intérêt public ».

Objet

Les présentes lignes directrices ont pour objet de donner des indications sur les facteurs à prendre en considération et les procédures à suivre lorsque la certification d’un aérodrome est envisagée pour des raisons d’« intérêt public ».

Contexte

L’alinéa 302.01(1)c) du RAC permet la certification d’un aérodrome pour lequel le ministre est d'avis que le respect des exigences nécessaires à la délivrance d'un certificat d'aéroport serait dans l'intérêt public et augmenterait la sécurité quant à l'utilisation de l'aérodrome

Étant donné que la certification doit toujours augmenter la sécurité quant à l’utilisation de l’aérodrome, l’application de l’alinéa 302.01(1)c) du RAC est assujettie au fait que le ministre s’estime convaincu que la certification réponde à l’« intérêt public ».

Comme l’indique la Directive de l’Aviation civile nº 1, le concept d’« intérêt public » n’a pas de signification fixe en droit et dépend des faits et des circonstances entourant un cas particulier. Il est clair, cependant que les simples intérêts « privés » du propriétaire / de l’exploitant de l’aéroport ne sauraient en eux-mêmes satisfaire aux critères définissant l’« intérêt public ». Le ministre doit envisager un vaste éventail de facteurs, dont les activités de l’aéroport, relevant de sa responsabilité et de son autorité générales en vertu de la Loi sur l’aéronautique1.

1 Sous sa forme actuelle, la Loi sur l’aéronautique stipule que le ministre est chargé du développement et de la réglementation de l'aéronautique, ainsi que du contrôle de tous les secteurs liés à ce domaine. À cet égard, la sécurité du transport aérien a toujours été considérée comme essentielle. La Loi sur l’aéronautique est actuellement en cours de révision et doit être modifiée afin de stipuler en termes plus précis ce que sont les objectifs de la Loi et les responsabilités correspondantes du ministre.

Procédures

Les procédures (annexe « A ») et la documentation consultative (annexe « B») ci-jointes doivent être utilisées lorsque la demande de certification d’un aérodrome se fonde sur des raisons d’intérêt public.

  1. La délivrance d’un certificat d’aéroport pour des raisons d’intérêt public ne sera envisagée par Transports Canada que sur dépôt d’une demande faite par :

    1. le propriétaire / l’exploitant de l’aérodrome; ou

    2. Sécurité des aérodromes de Transports Canada.

    Nota : un aérodrome muni d’une tour de contrôle devra être certifié pour des raisons d’intérêt public.

  2. Il incombera au demandeur de fournir la preuve que la certification relève de l’intérêt public. Pour ce faire, le demandeur devra suivre une procédure documentée visant à obtenir l’avis de toutes les parties intéressées pouvant être touchées et, notamment :

    • la ou les collectivités locales / autorités responsables de l’utilisation du terrain;

    • les utilisateurs et les fournisseurs de service de l’aérodrome;

    • les exploitants d’aérodrome ou d’aéroport se trouvant à proximité de l’aérodrome visé;

    • le milieu d’affaires local;

    • la ou les associations locales de propriétaires;

    • l’ensemble du public touché; et

    • l’exploitant de l’aérodrome lorsque la procédure a été déclenchée part Transports Canada.

  3. La demande doit préciser :

    • pourquoi les installations existantes (certifiées ou non) sont inadaptées pour assurer ou pour permettre une desserte aérienne économique et efficace;

    • les répercussions économiques prévues de la certification sur l’aérodrome visé;

    • les répercussions économiques prévues de la certification sur les utilisateurs de l’aérodrome visé et les autres parties intéressées;

    • les répercussions environnementales prévues, s’il y a lieu, et la manière dont elles seront gérées;

    • la liste des parties intéressées en faveur de la certification et la liste de celles qui y sont opposées;

    • en quoi la certification de l'aérodrome améliorera la sécurité aérienne.

  4. Sur réception de la demande renfermant tous les renseignements indiqués ci-dessus, Transports Canada étudiera cette dernière en vue de décider si la certification de l’aérodrome relève de l’intérêt public. Pour ce faire, Transports Canada devra vérifier :

    • si les installations existantes sont inadaptées pour répondre aux besoins présents et prévus des utilisateurs;

    • si la certification constituera un bénéfice net pour l’aérodrome, les utilisateurs et les parties intéressées en général;

    • si la décision risque de créer un précédent et de donner lieu à d’autres cas similaires;

    • si les répercussions environnementales peuvent être gérées de façon efficace;

    • si le propriétaire / l’exploitant ou leurs représentants ont un dossier aéronautique insatisfaisant rendant inapproprié le fait de lui confier des responsabilités réglementaires supplémentaires.

  5. Lorsque la ou les collectivités locales / autorités responsables de l’utilisation du terrain sont opposées à la certification de l’aérodrome, cette dernière ne peut être effectuée sans l’approbation de l’Administration centrale.

  6. Les aérodromes répondant aux critères d’intérêt public doivent, bien entendu, répondre aux normes applicables ou aux conditions de délivrance d’un certificat en vertu de l’article 302.03 du RAC.

  7. Une fois certifié par Transports Canada pour des raisons d’« intérêt public », un aéroport demeure assujetti aux mêmes exigences d’inspection / de vérification que tout autre aéroport certifié.

Résumé

La documentation consultative et les procédures définies par la présente circulaire doivent être utilisées pour toute demande de certification d’un aérodrome pour des raisons d’intérêt public, et ce, conformément à l’alinéa 302.01(1)c) du RAC. Chaque demande doit être examinée sur le fond. Les intérêts des parties intéressées doivent être pris en compte lorsqu’il s’agit d’établir que la certification de l’aérodrome relève de l’intérêt public.

Jennifer J. Taylor, La directrice
Services de la navigation aérienne et espace aérien
Sécurité des aérodromes

 

Appendix A

INTÉRÊT PUBLIC

En règle générale, le concept d'intérêt public n'a pas de signification fixe en droit, et sa portée peut être étendue ou restreinte selon les circonstances. Il est clair, cependant, que la simple protection d'un « intérêt privé » ne saurait suffire. On doit considérer l'incidence qu'aura l'exemption sur d'autres membres ou segments de la collectivité réglementée ainsi que sur le grand public.

 

FACTEURS GÉNÉRAUX JUSTIFIANT LE RECOURS AU PRINCIPE D’« INTÉRÊT PUBLIC »

Lorsqu’il exerce son pouvoir discrétionnaire pour se prononcer sur ce qui constitue l’intérêt public, le ministre doit, au regard du contexte des faits et de la Loi, décider ce qui relève, ou ne relève pas, de l’intérêt public.

Le ministre ne doit user de son pouvoir discrétionnaire qu’après avoir examiné chaque cas sur le fond. La politique est pertinente, mais seulement dans la mesure où elle s’applique aux faits et, avant de se prononcer, le ministre doit entreprendre l’analyse définie dans l’annexe « B ».

La première étape, lorsqu’il s’agit de se prononcer sur fait que la certification d’un aérodrome relève de l’intérêt public, consiste à examiner et à documenter les facteurs généraux suivants :

  • tous les facteurs ayant trait aux responsabilités du ministre au regard de l’aéronautique en vertu de l’article 4.2 de la Loi sur l’aéronautique ou ayant trait aux pouvoirs réglementaires généraux au regard de l’aéronautique en vertu de l’article 4.9 de la Loi sur l’aéronautique;

  • tous les facteurs ayant trait au dossier aéronautique d’un demandeur de document d’aviation canadien en vertu du paragraphe 6.71(1) de la Loi sur l’aéronautique;

  • tous les facteurs ayant directement trait au bien-fondé du service de transport, à ses conditions essentielles en matière d’économie et d’efficacité, ainsi qu’à la mise à disposition adéquate et au bon usage des installations de transport;

  • tous les facteurs ayant trait à la santé et à la sécurité du public de l’aviation, ainsi qu’aux intérêts, aux besoins et au bien-être du grand public;

  • tous les facteurs venant étayer le principe juridique fondamental voulant que justice soit faite et soit perçue comme ayant été faite.

Si l’un de ces facteurs ne peut être invoqué, le recours au principe d’intérêt public pour accorder ou pour refuser la certification d’un aérodrome ne saurait se justifier.

 

FACTEURS PARTICULIERS JUSTIFIANT LE RECOURS AU PRINCIPE D’« INTÉRÊT PUBLIC »

La décision de certifier ou non un aérodrome dans l’intérêt public doit être prise compte tenu des circonstances de chaque cas particulier et dans les limites de la compétence de la Loi sur l’aéronautique.

Il ne suffit pas, pour accorder la certification d’un lieu, de juger que l’aérodrome est « sûr » et « commercialement viable » pour le demandeur.

Il faut également examiner les facteurs relatifs aux répercussions sur la sécurité du grand public.

Les conséquences de la certification d’un aérodrome doivent être examinées au regard des besoins, ou des intérêts, du public de l’aviation et de la collectivité locale, ces conséquences pouvant relever de la commodité commerciale ou pratique, ou bien encore des nécessités de l’exploitation.

La certification d’un aérodrome en vertu des dispositions relatives à l’application du principe d’intérêt public de la sous partie 302 de la Partie III du RAC doit être profitable pour l’industrie aéronautique dans son ensemble et être dans l’intérêt de la majorité des parties intéressées, et non pas seulement de l’aérodrome ou de la collectivité.

Il faut tenir compte des répercussions de la décision sur le demandeur, le grand public et les autres membres de l’industrie aéronautique.

Les répercussions économiques de la certification de l’aérodrome, de même que celles du maintien du statu quo, doivent être examinées tant du point de vue de l’exploitant de l’aérodrome que du point de vue de la collectivité dans son ensemble.

Le fait que ces facteurs soient corroborés doit être documenté dans le cadre d’une procédure de consultation de toutes les parties intéressées.

C’est à la personne ayant déposé la demande de certification d’un aérodrome pour des raisons d’intérêt public qu’il incombe de démontrer que les exigences ci-dessus sont bien remplies. Cette personne est généralement Transports Canada ou l’exploitant de l’aérodrome.

Sécurité des aérodromes de Transports Canada doit s’assurer qu’elle dispose des ressources nécessaires pour assurer le programme d’inspection requis de ce nouvel aéroport.

 

Appendix B

ANALYSE JURIDIQUE DE LA DÉCLARATION D’« INTÉRÊT PUBLIC » EN VERTU DE LA LOI

 

Que signifie le terme « intérêt public » au regard de la Loi sur l’aéronautique ?

Il n’existe aucune définition réglementaire de l’« intérêt public ».

Le Parlement a par contre délégué au ministre le pouvoir discrétionnaire de se prononcer sur ce que constitue l’intérêt public.

 

Comment le ministre exerce-t-il ce pouvoir discrétionnaire ?

Il doit tenir compte de tous les faits pertinents et du droit.

Il ne doit pas se laisser influencer par des considérations non pertinentes.

Il doit tenir compte de la lettre et de l’intention de la Loi qui lui confère le pouvoir d’agir.

 

Comment le ministre détermine-t-il les considérations pertinentes ?

Il doit examiner les faits et le droit au regard de la lettre et de l’esprit de la Loi.

Il doit prendre sa décision en fonction des politiques que l’on trouve dans la Loi.

 

Quelles sont les politiques que l’on trouve dans la Loi sur l’aéronautique ?

L’article 4.2 contient la politique la plus claire :

« Le ministre est chargé du développement et de la réglementation de l’aéronautique, ainsi que du contrôle de tous les secteurs liés à ce domaine. »

 

Article 4.9

Le principal objectif de la réglementation en vertu de la Loi est de maintenir un niveau acceptable de sécurité.

Le principal objectif de la supervision en vertu de la Loi est d’assurer la conformité aux normes réglementaires.

 

Jurisprudence

Le ministre assume une lourde responsabilité, à l’égard du grand public, en ce qui concerne la sécurité de l’exploitation des transporteurs aériens.

Le ministre a la responsabilité, à l’égard du grand public, d’exécuter les exigences législatives et réglementaires dans l’intérêt de la sécurité publique.

Le ministre dispose, lorsqu’il s’agit de se prononcer sur l’intérêt public, de toute la latitude nécessaire pour examiner les facteurs qu’il juge pertinents, pour autant que ces derniers soient liés à la question traitée.

 

Quel est l’intérêt public principal en vertu de la Loi sur l’aéronautique ?

La sécurité du public de l’aviation par le strict respect des règles de sécurité.

 

Responsabilités du Ministre

Le ministre doit prendre sa décision en gardant à l’esprit les politiques suivantes :

  1. Le ministre est responsable à l’égard du public de la réglementation et de la supervision des activités aériennes afin de promouvoir la sécurité.

  2. La Loi permet un régime détaillé de réglementation visant à promouvoir un niveau de sécurité aérienne acceptable.

  3. Les pilotes, les transporteurs aériens et les autres participants de l’industrie aéronautique sont tenus de se conformer à ces règlements et d’établir ainsi un niveau de sécurité aérienne acceptable.