par Robert Kostecka, inspecteur de la division des Normes de vol, Aviation civile, Transports Canada
Les pilotes sont formés pour savoir qu’ils doivent comprendre et respecter les limites de leur aéronef afin que les opérations aériennes soient effectuées en toute sécurité. Pour la même raison, les pilotes qui volent selon les règles de vol aux instruments (IFR) doivent également comprendre et respecter les limites de l’aérodrome. L’une de ces limites, qui est nécessaire pour assurer un niveau de sécurité reconnu, est le niveau de service de la piste.
Le Règlement de l’aviation canadien (RAC) reflète cette exigence de sécurité; l’alinéa 602.96(2)b) exige que le commandant de bord d’un aéronef s’assure que l’aérodrome convient à la manœuvre prévue avant d’effectuer un décollage, un atterrissage ou toute autre manœuvre à un aérodrome. Le niveau de service de la piste est un élément important pour déterminer si un aérodrome convient aux opérations IFR.
Jusqu’à présent, les exigences de visibilité relative au niveau de service de la piste n’étaient pas harmonisées aux exigences de visibilité pour les phases de décollage et d’approche/d’atterrissage. Ce manque d’harmonisation a entraîné une complexité indue, ce qui augmente la charge de travail des pilotes et leur cause une distraction inutile pendant les phases critiques de vol.
La nécessité de remédier à cette complexité est reflétée dans la recommandation A20-01 du Bureau de la sécurité des transports (BST) : « que le ministère des Transports revoie et simplifie les minimums opérationnels pour les approches et les atterrissages aux aérodromes canadiens ». La simplification de ces exigences est également appuyée par les commentaires que Transports Canada a reçus de la part des pilotes et des exploitants.
Afin de mieux comprendre cet enjeu de sécurité important et les mesures prises pour répondre aux possibilités d’amélioration ciblées, le présent article présente :
- un aperçu du niveau de service de la piste − les fonctions qu’il est destiné à remplir, la façon dont il est établi et la façon dont il est communiqué;
- la situation actuelle − une explication de la hiérarchie actuelle des comptes rendus de visibilité ainsi que des possibilités d’amélioration; et
- la voie à suivre − les solutions mises en œuvre pour répondre aux enjeux de sécurité cernés.
Aperçu du niveau de service de la piste
Les exigences de visibilité relatives au niveau de service de la piste ont été établies afin de s’assurer que les pilotes disposent de signaux visuels adéquats pour :
- établir et maintenir une connaissance de leur environnement (c.-à-d. permettre aux pilotes de savoir où ils se trouvent sur l’aérodrome); et
- reconnaître et éviter toute autre circulation au sol, notamment les autres aéronefs et les véhicules (c.-à-d. « voir et éviter »).
Cette importante limitation s’applique chaque fois qu’un aéronef effectue une manœuvre au sol, notamment lors du refoulement, de la circulation au sol avant le décollage, du décollage, de l’approche et de l’atterrissage ainsi que de la circulation au sol après l’atterrissage.
L’exploitant de l’aérodrome est responsable d’établir les niveaux de service de son aérodrome et de s’assurer que l’aérodrome est équipé et exploité en conséquence. Ces responsabilités sont indiquées dans le TP 312, Normes et pratiques recommandées pour les aérodromes, et à l’article 302.07 du RAC. Cette valeur de visibilité critique est établie en tenant compte des éléments ci-dessous.
- Les exigences en matière d’infrastructure d’aérodrome, y compris (sans s’y limiter) :
- le marquage et le balisage lumineux des voies de circulation et des pistes (choses qui sont visibles par les pilotes); et
- les exigences en matière de circuits d’éclairage de la piste et de source d’alimentation de secours (choses moins évidentes pour les pilotes).
- Les procédures d’exploitation particulières à l’aérodrome, y compris :
- un plan d’exploitation par visibilité réduite (RVOP); et
- un plan d’exploitation par faible visibilité (LVOP).
La visibilité établie comme niveau de service de la piste s’applique aux pistes individuelles et aux voies de circulation utilisées lors de la circulation au sol vers la piste précisée et pour en revenir. Dans certains cas, pour les opérations par visibilité réduite ou par faible visibilité, des voies de circulation spécifiques sont déterminées pour appuyer le niveau de service de la piste.
Le niveau de service de la piste est publié dans le Supplément de vol — Canada (CFS). Il pourrait également être publié dans le Canada Air Pilot (CAP) ou dans le Canada Air Pilot restreint (RCAP). Dans le CFS, le CAP et le RCAP, le niveau de service de la piste est toujours exprimé en portée visuelle de piste (RVR) (avec une visibilité au sol correspondante, le cas échéant), même pour les pistes qui ne sont pas équipées de capteurs du système RVR. La terminologie est utilisée pour assurer la cohérence avec les dispositions du RAC et l’harmonisation avec les approbations spécifiques qui autorisent les exploitants à effectuer des décollages et des approches dans des conditions de visibilité réduite et de faible visibilité.
Si aucune RVR n’est publiée pour une piste précise, les opérations sur les pistes et sur les voies de circulation sont limitées à la visibilité standard de RVR 2 600 ( mille terrestre [SM]) et plus. Une indication de « RVR 1 200 ( SM) » veut dire que la piste satisfait aux exigences relatives aux opérations sur les pistes et sur les voies de circulation avec une RVR entre 2 600 ( SM) et 1 200 ( SM), inclusivement. Une indication de « RVR 600 » indique que la piste satisfait aux exigences relatives aux opérations sur les pistes et sur les voies de circulation avec une RVR entre 1 200 ( SM) et 600, inclusivement.
Il existe des critères spécifiques pour déterminer si la visibilité signalée répond au niveau de service de la piste. Ces critères sont fournis dans la Circulaire d’information (CI) no 602-002, Visibilité opérationnelle aux aérodromes, et dans le Canada Air Pilot — General (CAP GEN).
La situation actuelle
Un examen complet des exigences de visibilité a été effectué pour toutes les phases de vol dans le cadre de l’examen de l’interdiction d’approche par Transports Canada. Au cours de l’examen, Transports Canada a cerné d’importantes possibilités d’amélioration, applicables à d’autres phases de vol, qui devaient également être abordées. Puisqu’elles s’appliquent chaque fois qu’un aéronef effectue une manœuvre à l’aérodrome, les exigences relatives au niveau de service de la piste sont d’une grande importance.
Les recommandations du BST ainsi que les commentaires des pilotes et des exploitants ont permis de cerner deux principaux problèmes concernant les critères actuels des comptes rendus de visibilité utilisés pour le niveau de service de la piste.
- Ils sont trop compliqués. On dénombre quatre ensembles de critères pour les comptes rendus de visibilité; ils dépendent du départ ou de l’arrivée de l’aéronef ainsi que de la présence ou non sur le site d’une tour de contrôle de la circulation aérienne en service. Dans trois des ensembles, il y a un ordre de comptes rendus prescrit, et dans le quatrième, le compte rendu le plus restrictif est limitatif.
- Ces critères (utilisés pour le niveau de service de la piste) ne sont pas harmonisés avec la hiérarchie des rapports de visibilité indiquée dans le RAC pour :
- le décollage (paragraphe 602.126[2]); et
- l’approche et l’atterrissage (articles 602.129, 700.10, 703.41, 704.37 et 705.48).
Pour faire face à cette complexité et faciliter la prise de décision, de nombreux pilotes et exploitants ont eu recours à l’élaboration d’organigrammes complexes. Cette situation est propre au Canada; il n’est pas nécessaire de prendre de telles mesures pour les opérations aériennes nulle part ailleurs dans le monde.
Le BST a formulé une importante recommandation visant à « revoir et simplifier ». De plus, les pilotes et les exploitants canadiens ont clairement exprimé la nécessité de procéder à la révision et à la simplification des exigences.
La voie à suivre
La recommandation A20-01 du BST, qui enjoint à Transports Canada « [de revoir et de simplifier] les minimums opérationnels pour les approches et les atterrissages […] », a également obligé Transports Canada à tenir compte des exigences actuelles de visibilité pour toutes les phases de vol.
L’objectif de Transports Canada a été de simplifier la réglementation et les procédures connexes afin qu’elles soient faciles à comprendre et à appliquer pour les pilotes et les exploitants.
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Les hiérarchies de visibilité pour toutes les phases de vol sont désormais harmonisées avec une priorité simple et uniforme :
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la RVR;
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la visibilité au sol; et
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la visibilité sur la piste.
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Cette priorité simple et cohérente est appliquée aux nouvelles dispositions en cours d’élaboration pour définir :
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la hiérarchie des rapports de visibilité précisée pour le décollage au paragraphe 602.126(2) du RAC; et
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la hiérarchie des rapports de visibilité précisée pour l’approche au paragraphe 602.129 du RAC.
Remarque : Toutes les autres dispositions relatives à la visibilité lors de l’approche, notamment les articles 700.10, 703.41, 704.37 et 705.48 du RAC, sont abrogées.
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Pour simplifier davantage les processus de prise de décision opérationnelle pour les pilotes :
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la hiérarchie des rapports de visibilité lors du départ (c.-à-d. lors du refoulement, de la circulation au sol avant le décollage et du décollage) sera fondée sur la hiérarchie des rapports de visibilité précisés pour le décollage au paragraphe 602.126(2) du RAC;
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la hiérarchie des rapports de visibilité lors de l’arrivée (c.-à-d. lors de l’approche/l’atterrissage et de la circulation au sol après l’atterrissage) sera fondée sur la hiérarchie des rapports de visibilité précisés pour l’approche à l’article 602.129 du RAC; et
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les critères de conception des instruments énoncés dans le TP 308, Critères d’élaboration des procédures de vol aux instruments, ont été modifiés pour s’assurer que la visibilité indiquée sur les cartes pour les approches aux instruments sera supérieure ou égale au niveau de service de la piste.
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De nouvelles directives sur le niveau de service de la piste sont également en cours d’élaboration pour refléter les nouvelles exigences simplifiées et harmonisées. Il y a du pain sur la planche, notamment la mise à jour du CAP GEN, du CFS et de la CI 602-002.
La simplification et l’harmonisation mises en œuvre élimineront les deux processus de prise de décision distincts qui sont actuellement utilisés pour déterminer la visibilité requise pour les phases de départ et d’arrivée.
Les pilotes et les exploitants auront désormais des processus de prise de décision simplifiés, à la fois pour le départ et l’arrivée, qui sont clairs, simples et faciles à utiliser.