Document d’intention : Améliorer les mesures d’intervention en cas de déversement d’hydrocarbures - mesures d’intervention de rechange

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Résumé

Le Canada utilise de grandes quantités de pétrole, qui sont transportées au sein de la chaîne d'approvisionnement du Canada vers les marchés nationaux et internationaux pour être utilisées dans le secteur de la fabrication, et pour le chauffage résidentiel, la production de carburants de transport et la fabrication de nombreux produits. Le pétrole reste donc très présent au Canada, et bien que le risque qu'un déversement d'hydrocarbures ne survienne soit très faible, il ne peut être éliminé.

Pour minimiser les répercussions d'un déversement sur l'environnement et les collectivités, le Canada doit être bien préparé à agir, pour empêcher qu'une plus grande quantité d'hydrocarbures ne pénètre dans l'environnement, et pour retirer ou maîtriser les hydrocarbures déversés le plus rapidement possible.

À cette fin, le Canada dispose de systèmes complets de prévention des déversements, et de préparation et d'intervention en cas de déversement d'hydrocarbures, qui sont conçus pour prévenir et maîtriser efficacement les déversements d'hydrocarbures dans l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement. L'approche actuelle du Canada en matière d'intervention repose sur le confinement et la collecte des hydrocarbures à l'aide de mesures mécaniques, comme des absorbants, des barrages flottants et des récupérateurs. Ces mesures sont efficaces en cas de déversements de faible ampleur et localement circonscrits, et pour protéger des zones ou des habitats spécifiques le long du littoral. Cependant, elles ont aussi leurs limites, notamment lorsqu'elles sont utilisées pour gérer des déversements de grande ampleur ou qui se produisent dans des conditions difficiles (par exemple dans des endroits éloignés, ou en présence de glace).

Pour renforcer la capacité du Canada à intervenir en cas de déversement d'hydrocarbures, le gouvernement fédéral envisage de permettre l'utilisation prudente et appropriée de mesures d'intervention de rechange (MIR) comme outils d'intervention supplémentaires. On améliorera ainsi l'intervention en cas de déversement d'hydrocarbures en tirant parti de techniques et de technologies bien établies, tout en prenant en considération les techniques et technologies émergentes. Les MIR englobent une large gamme de produits, de processus et de techniques visant à répondre aux déversements d'hydrocarbures et à réduire leurs répercussions sur l'environnement. Il s'agit notamment de produits comme les agents de traitement de déversements, qui modifient l'évolution et le comportement des hydrocarbures déversés; de procédés permettant de reverser une eau plus saine dans la zone du déversement; et de techniques permettant de rediriger les hydrocarbures répandus le long d'un rivage vers l'eau afin d'en favoriser leur récupération ou leur dégradation naturelle, ou encore le brûlage des hydrocarbures déversés à la surface de l'eau.

Dans un premier temps, le gouvernement fédéral envisage d'apporter des modifications législatives afin d'établir un cadre national qui permettra d'assurer une utilisation prudente et appropriée des MIR, en tant qu'outils supplémentaires au sein du système d'intervention existant, lorsque leur emploi serait bénéfique pour la protection de l'environnement. Le cadre permettrait par ailleurs de mettre en place un certain nombre de garanties, notamment des exigences législatives, des règlements, des orientations opérationnelles et techniques, afin de garantir que les MIR sont utilisées lorsqu'on a déterminé qu'elles auront probablement un avantage net pour l'environnement. Ce cadre serait applicable pour l'utilisation des MIR dans l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement en pétrole, y compris à la navigation maritime, aux activités de prospection et de production en mer et aux pipelines réglementés par le gouvernement fédéral.

Le présent document d'intention politique offre un aperçu de l'éventuel Cadre relatif aux MIR qui seraient appliquées en cas de déversement d'hydrocarbures au Canada, et vous offre également l'occasion de soumettre vos commentaires sur les garanties législatives proposées qui assureraient une utilisation sûre et appropriée des MIR.

Options d'intervention actuelles : science et processus décisionnel

Au cours des cinq dernières décennies, le gouvernement fédéral a mis sur pied l'un des meilleurs programmes de recherche au monde sur les déversements d'hydrocarbures, qui s'appuie sur une vaste expérience et une solide expertise dans l'étude de l'évolution et du comportement des hydrocarbures, de leurs propriétés physiques et chimiques, de la science pétrolière, des mesures de prévention des déversements, de l'intervention sur le terrain et de la modélisation des déversements. Dans le cadre de ses activités de recherche, le Canada procède à la caractérisation des propriétés des produits pétroliers afin d'anticiper leur comportement et leur toxicité dans l'environnement en cas de déversement d'hydrocarbures.

Les déversements d'hydrocarbures sont complexes et chaque déversement est unique. Au Canada, une grande variété de produits pétroliers sont transportés chaque jour, notamment des pétroles bruts légers, des combustibles lourds et des produits à base de bitume. Chaque type de produit pétrolier a ses propres caractéristiques et se comporte différemment lorsqu'il se répand dans l'environnement, posant ainsi différents défis pour les activités de nettoyage.

Dès que du pétrole est déversé, que ce soit sur terre ou dans l'eau, ses propriétés physiques et chimiques commencent à changer en raison de son exposition au soleil, à l'air, à l'eau et/ou aux sols. Les éléments légers du pétrole s'évaporent dans l'air, les parties solubles se dissolvent dans l'eau, une partie du pétrole forme des gouttelettes dans l'eau sous l'action du vent et des vagues, lesquelles peuvent interagir avec des particules dans l'eau et éventuellement se déposer au fond, ou encore, le pétrole peut former des mélanges d'eau et de pétrole (appelés émulsions). L'ensemble de ces processus et modifications du pétrole s'appelle « météorisation ». Le pétrole peut également rester à la surface de l'eau, et ainsi se répandre et atteindre des rivages sensibles, ou se déplacer de la terre vers les cours d'eau, ce qui peut augmenter considérablement la zone d'impact du déversement.

Plus les intervenants pourront atteindre tôt le déversement et le maîtriser efficacement, avant que celui-ci ne se répande et ne se transforme sous l'effet de la météorisation, plus grande sera la capacité à protéger l'environnement et la santé humaine. L'objectif ultime est toujours de protéger au mieux les ressources vulnérables et de restaurer les zones affectées par la pollution par les hydrocarbures.

De nombreux facteurs contribuent au processus de décision afin de déterminer la meilleure façon d'intervenir. Par exemple, les conditions physiques comme le vent, les vagues, les courants, les marées, la morphologie du paysage, la température et la présence de glace ou de particules en suspension dans l'eau influenceront le mouvement et la distribution des hydrocarbures dans l'environnement. Ces facteurs modifient la façon dont le pétrole se comportera, sa trajectoire, et quelles ressources il affectera. De plus, ils influencent les options d'intervention envisageables et appropriées.

Lorsqu'un déversement se produit, des décisions doivent souvent être prises de toute urgence quant aux mesures à prendre pour contrôler la propagation et la récupération des hydrocarbures déversés, ainsi que pour assurer la protection des ressources sensibles et dignes d'intérêt. Les premiers répondants, comme les organismes d'intervention agissant au nom du pollueur, les responsables gouvernementaux, les experts de l'industrie, les collectivités locales et les gardiens du savoir autochtone, commencent par compiler les informations connues sur la nature du déversement en question et les ressources susceptibles d'être affectées. Ils analysent les avantages, les inconvénients et les compromis potentiels des mesures d'intervention disponibles, leur capacité à protéger les ressources et les stratégies d'atténuation des risques. Ils décident ensuite de la stratégie d'intervention appropriée. Ce processus d'analyse se fonde sur les meilleures informations accessibles, comme le type de pétrole déversé, les conditions météorologiques, les sensibilités environnementales et les potentielles répercussions socioéconomiques, culturelles et communautaires. Il est également itératif, intégrant de nouvelles informations et connaissances au fur et à mesure qu'elles sont disponibles, et s'adaptant aux conditions changeantes du déversement.

Outils d'intervention actuels

L'équipement actuel d'intervention généralement utilisé au Canada comprend ce qui suit.

  • Barrages flottants : barrières physiques flottantes qui piègent et confinent les hydrocarbures afin qu'on puisse les récupérer lors de déversements dans l'eau ou sur terre. Les barrages flottants sont également utilisés pour protéger les zones sensibles d'un déversement d'hydrocarbure.
  • Récupérateurs et camions aspirateurs : dispositifs qui éliminent les hydrocarbures de la surface de l'eau ou de la terre par aspiration par pression négative ou à l'aide d'équipement mécanique, pour récupérer et retirer les hydrocarbures.
  • Absorbants : substances qui capturent le pétrole qui adhère à la surface ou qui est absorbé à l'intérieur de la structure d'un matériau. Ils sont le plus souvent utilisés pour piéger les hydrocarbures flottants et dispersés ou éliminer les dernières traces d'hydrocarbures à la surface, ainsi que dans les zones qui ne peuvent pas être atteintes par les récupérateurs.

D'ici à ce que des MIR soient disponibles, ces mesures mécaniques resteront la principale option d'intervention pour confiner et récupérer les hydrocarbures et protéger les ressources environnementales. Toutefois, leur efficacité peut être compromise par des facteurs logistiques et environnementaux, comme le type d'hydrocarbures, l'ampleur du déversement, les caractéristiques environnementales, l'équipement disponible et les conditions météorologiques. Par exemple, un barrage flottant pourrait être moins efficace pour intervenir en cas de déversements très importants dans un environnement marin éloigné et ouvert, car le déploiement du barrage sera probablement plus lent que la propagation du pétrole. De mauvaises conditions météorologiques peuvent amener le pétrole à se répandre plus loin et plus vite, et entraver la capacité des bateaux d'intervention à remorquer l'équipement. Des études de cas de déversements majeurs en milieu marin ouvert, comme celui de Deepwater Horizon en 2010 aux États Unis, montrent les limites des mesures mécaniques de récupération ou de traitement du pétrole.Note de bas de page 1

Pour minimiser les effets potentiels d'un déversement d'hydrocarbures, le Canada étudie la meilleure façon de se doter d'une gamme d'outils pour intervenir de la manière la plus efficace possible afin de protéger notre environnement, la santé humaine et les collectivités.

Mesures d'intervention de rechange envisagées

Les MIR renvoient de façon générale à une série d'outils et de techniques d'intervention dont l'utilisation est envisagée au Canada. Elles seraient complémentaires aux techniques classiques de confinement mécanique et de récupération, et sont déjà intégrées dans les régimes d'intervention de nombreux pays, comme les États UnisNote de bas de page 2, le Royaume UniNote de bas de page 3, l'AustralieNote de bas de page 4 et la NorvègeNote de bas de page 5.

Plus de 50 ans de recherches scientifiques, menées à l'échelle internationale et par nos propres chercheurs canadiens, ainsi que l'application de MIR lors de déversements internationaux majeurs, ont fourni des preuves solides à l'égard des risques et des avantages de leur utilisation dans des conditions réelles de déversement. Cette base de données probantes a été renforcée par les investissements du Canada dans l'Initiative de recherche multipartenaires (IRMPNote de bas de page 6). Collectivement, ce puits de connaissances et d'expérience fournit une base importante pour comprendre et inclure les MIR comme outils supplémentaires au régime d'intervention en cas de déversement au Canada, y compris savoir comment utiliser les MIR et gérer les risques associés.

Les MIR se sont révélées des outils efficaces pour nettoyer les déversements d'hydrocarbures et peuvent engendrer de meilleurs résultats environnementaux, notamment :

  • Diluer rapidement le pétrole déversé à de très faibles concentrations et de ce fait, améliorer la biodégradation naturelle du pétrole déversé;
  • Aider à rediriger le pétrole pour l'éloigner des espèces et des écosystèmes sensibles, ainsi que des zones plus difficiles à nettoyer, comme les rivages;
  • Améliorer l'efficacité des opérations d'intervention, par exemple en ce qui concerne la gestion des déchets, afin de permettre une meilleure récupération des hydrocarbures et la protection de l'environnement.

On continue de développer et de renforcer les MIR grâce à l'innovation et à l'évolution de la science. À l'heure actuelle, quatre catégories de MIR sont envisagées pour une utilisation potentielle au Canada. Toutefois, à mesure que des innovations émergeront, le Canada étudiera les nouvelles techniques d'intervention, y compris les techniques mécaniques, susceptibles d'améliorer la protection de l'environnement en cas de déversement d'hydrocarbures.

Agents de traitement de déversements

Les agents de traitement des déversements (ATD) englobent de nombreux types de produits qui modifient l'évolution et le comportement des hydrocarbures déversés, ou qui renforcent les processus naturels agissant sur les hydrocarbures dans l'environnement. Par exemple :

  • les dispersants sont utilisés pour traiter les nappes d'hydrocarbure à la surface de l'eau en décomposant l'hydrocarbure en gouttelettes et en le dispersant dans la colonne d'eau. Cela dilue les hydrocarbures à de très faibles concentrations et améliore la dégradation naturelle du pétrole par les bactéries. Ils peuvent être utilisés pour traiter les hydrocarbures déversés sur de grandes zones relativement rapidement, notamment dans des endroits éloignés, et dans un plus grand éventail de conditions environnementales;
  • les agents de nettoyage améliorent l'élimination du pétrole lourd et persistant des surfaces du rivage et en facilitent la récupération mécanique;
  • les repousseurs sont appliqués sur les bords d'une nappe d'hydrocarbure pour contracter ou rétrécir l'aire de la nappe. Le pétrole est ainsi plus facile à récupérer ou à brûler à la surface de l'eau (voir la description plus bas de la destruction par brûlage in-situ);
  • les agents de bioremédiation contribuent à favoriser la dégradation naturelle des hydrocarbures échoués dans les marais et sur les plages, ainsi que dans les zones intérieures.

Sur la base de la recherche scientifique et de l'expérience acquise dans d'autres pays, l'efficacité des ATD dépend de nombreux facteurs communs, comme le type de plan d'eau, le type d'hydrocarbures déversés, les vagues, la température et les modifications des hydrocarbures déversés au fil du temps en raison de la météorisation.

Ce qui distingue cette technique des autres types de MIR, c'est que les dispersants peuvent être appliqués sur de vastes zones relativement rapidement, y compris dans des endroits éloignés, et dans un plus grand éventail de conditions environnementales que d'autres mesures d'intervention. Cela permet de traiter les grandes nappes de surface avant que le pétrole n'atteigne les habitats sensibles, le littoral et d'autres ressources dignes d'intérêt. Cependant, l'utilisation de dispersants peut entraîner une exposition plus élevée à court terme des ressources situées à proximité de l'endroit où le pétrole est dispersé. C'est pourquoi les dispersants ne conviennent que dans les zones ouvertes où les volumes et les mouvements d'eau sont suffisants pour permettre aux gouttelettes d'hydrocarbures de se disperser et de se diluer.

Dans l'ensemble, les ATD peuvent modifier le comportement du pétrole en influençant sa trajectoire et les parties de l'environnement qui sont touchées. Compte tenu de cet effet sur le mouvement des hydrocarbures et de l'introduction de substances supplémentaires dans l'environnement, cette MIR doit être étudiée avec soin et une autorisation est nécessaire pour garantir qu'elle soit utilisée de façon appropriée pour minimiser les impacts environnementaux.

Décantation

Lors d'une intervention en cas de déversement d'hydrocarbures, les opérations typiques de récupération des hydrocarbures permettent de recueillir un mélange d'hydrocarbures et d'eau dans l'environnement. La décantation consiste à séparer l'eau de ce mélange et à renvoyer une eau relativement propre, qui peut renfermer une certaine quantité de résidus d'hydrocarbure, dans la zone de déversement. Le retour de cette eau plus propre dans le site du déversement réduit la quantité d'eaux usées devant être stockées à bord des navires-récupérateurs, puis transportées à des fins de traitement et d'élimination, lorsque ces navires ont une capacité de stockage limitée. Ce processus permet aux opérations de récupération de demeurer actives plus longtemps dans la zone de déversement et de favoriser la récupération d'une plus grande quantité de pétrole. L'accès à cette technique serait particulièrement avantageux dans les endroits éloignés où la capacité de stocker et de traiter les déchets est limitée.

Bien que l'eau évacuée soit beaucoup plus propre que le mélange d'hydrocarbures et d'eau récupéré dans la zone de déversement, elle peut toujours contenir certains composants de pétrole et, pour cette raison, une autorisation serait requise pour la décantation.

Brûlage in-situ

Le brûlage in-situ consiste à éliminer les hydrocarbures déversés en le brûlant de façon contrôlée. Pour ce genre d'opérations, des barrages résistants au feu sont généralement utilisés pour recueillir, isoler et concentrer l'hydrocarbure et ainsi permettre une combustion prolongée. Les études relatives à ce type de techniques et l'expérience acquise dans d'autres pays montrent que le brûlage in-situ peut s'avérer très efficace pour éliminer de grandes quantités d'hydrocarbures de la zone de déversement, et que le panache de fumée qui en résulte se dissipe rapidement.

Le brûlage in-situ réduit la nécessité d'une grande partie de la manutention, du stockage, du traitement et de l'élimination des hydrocarbures, ce qui crée des économies par rapport à leur récupération. Il peut représenter une technique importante dans les endroits éloignés où l'infrastructure et les ressources d'intervention sont rares ou dans les endroits où les techniques mécaniques ne peuvent pas être utilisées en toute sécurité (par exemple dans la glace brisée ou dans les marais).

Il est parfois difficile d'enflammer le pétrole et de maintenir la combustion dans l'eau. Par conséquent, pour que le brûlage in-situ fonctionne, il faut :

  • une concentration en couches épaisses;
  • une source d'allumage;
  • potentiellement un produit allume feu, en particulier pour les hydrocarbures difficiles comme le pétrole lourd qui a été exposé à la météorisation pendant longtemps.

L'utilisation de produits allume feu ou d'accélérants, le risque d'incendie lui même et le panache de fumée qui en résulte sont les raisons pour lesquelles cette technique nécessiterait une autorisation préalable.

Translocation des hydrocarbures

Le processus de translocation des hydrocarbures consiste à déplacer l'hydrocarbure ou des matières enduites d'hydrocarbures (comme des galets ou du sable) du rivage jusqu'à l'eau, afin de faciliter la récupération de l'hydrocarbure ou d'améliorer les processus permettant sa dégradation naturelle. Par exemple, le rinçage des rivagesconsiste à évacuer l'hydrocarbure à l'aide d'un flux d'eau jusqu'à une zone dans l'eau confinée par un barrage, où il est plus facile de le récupérer.

Les techniques de translocation des hydrocarbures pourraient s'avérer particulièrement utiles dans les zones éloignées où l'accès à la zone contaminée peut être difficile et où les installations de stockage et de traitement des déchets sont limitées.

Comme dans le cas de certains ATD, la translocation des hydrocarbures peut avoir des répercussions à court terme plus importantes sur les organismes locaux pendant que l'hydrocarbure est mobile et avant qu'il soit récupéré ou dégradé. Avant toute autorisation, il est essentiel d'examiner attentivement où et dans quelles conditions l'utilisation de cette technique serait appropriée.

Garanties législatives proposées

Le Canada a mis en place un cadre législatif solide pour prévenir les déversements de pétrole et protéger l'environnementNote de bas de page 7. Une partie de cette législation peut également empêcher par inadvertance l'utilisation de certains outils de lutte contre les déversements d'hydrocarbures, comme les MIR. Par conséquent, le Gouvernement du Canada envisage d'effectuer des modifications législatives afin de permettre l'utilisation prudente et appropriée des ARM pour répondre aux déversements d'hydrocarbures dans l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement de pétrole, y compris la navigation maritime, les activités de prospection et de production en mer et les déversements de pipelines sous réglementation fédérale.

La récupération et l'élimination appropriée des hydrocarbures déversés constituent l'objectif principal à la suite d'un déversement, le but étant d'atténuer les répercussions les plus graves des hydrocarbures sur l'environnement et la santé humaine. Cependant, il pourrait être impossible de récupérer les hydrocarbures, alors que renforcer les processus naturels pourrait permettre d'obtenir de meilleurs résultats en matière de protection. Les MIR peuvent être combinées aux méthodes mécaniques conventionnelles pour augmenter la quantité de pétrole récupérée et améliorer les opérations de nettoyage. Une gamme élargie d'outils disponibles dans le cadre du régime canadien d'intervention en cas de déversement d'hydrocarbures, en plus de nos techniques actuelles de confinement et de récupération, permettrait aux intervenants de fournir la meilleure intervention possible pour protéger l'environnement et les ressources dignes d'intérêt. Toutes les nouvelles techniques d'intervention dont l'utilisation est envisagée feront l'objet de recherches et d'essais approfondis afin de garantir leur efficacité et leur caractère sécuritaire.

Cependant, l'utilisation incorrecte ou inappropriée des MIR peut générer des risques qui lui sont propres et une MIR donnée ne conviendra pas forcément pas à toutes les situations de déversement. Par conséquent, leur utilisation devrait être régie par un cadre juridique plus large comprenant de multiples garanties pour assurer la protection de l'environnement et de la santé humaine.

Exemples de garanties législatives envisagées :

Permettre l'autorisation d'appliquer des MIR en cas de déversement d'hydrocarbures

Le gouvernement fédéral envisage d'effectuer des modifications législatives pour permettre au ministère ou à l'organisme gouvernemental responsable dans les secteurs désignés d'autoriser l'application d'une MIR pendant une intervention en cas de déversement d'hydrocarbures. Les MIR pouvant être autorisées seraient énoncées dans les règlements, et les secteurs désignés comprendraient la navigation maritime, les activités d'exploration et de production en mer, et les pipelines réglementés par le gouvernement fédéral :

  • la Garde côtière canadienne en tant que principal organisme d'intervention fédéral pour les déversements provenant de navires;
  • l'Office Canada–Terre‑Neuve‑et‑Labrador des hydrocarbures extracôtiers, l'Office Canada–Nouvelle‑Écosse des hydrocarbures extracôtiers ou la Régie de l'énergie du Canada en tant qu'organisme d'intervention principal pour les déversements découlant d'activités d'exploration et de production extracôtières;
  • la Régie de l'énergie du Canada en tant qu'organisme d'intervention responsable des déversements provenant de pipelines sous réglementation fédérale;
  • pour les déversements d'hydrocarbures de toute autre source et pour lesquels aucun ministère ou organisme fédéral responsable n'est précisé, Environnement et Changement climatique Canada autoriserait le recours aux MIR en appui à l'organisme d'intervention.

Cette approche reconnaît l'expertise de chaque autorité responsable, et le fait qu'elles sont les mieux placées pour déterminer l'utilisation appropriée des MIR pour les déversements touchant leur secteur.

Réglementation relative aux types de MIR pouvant être utilisés au Canada et à leur utilisation

Le Gouvernement du Canada envisage de modifier la législation afin de permettre aux règlements nationaux centralisés en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement de 1999 de préciser les types de MIR dont l'application pourrait être autorisée au Canada lors d'un déversement d'hydrocarburesNote de bas de page 8. Par exemple, une réglementation potentielle garantirait que seules les MIR qui ont fait l'objet d'une recherche et d'une évaluation scientifiques rigoureuses pour comprendre leurs propriétés, leurs avantages, leurs limites et leurs risques, et dont l'efficacité à jouer un rôle bénéfique dans la lutte contre les déversements d'hydrocarbures a été démontrée, pourront être utilisées. Cette évaluation s'appuiera sur des décennies de connaissances et d'expérience qui ont été et continuent d'être acquises à l'échelle internationale et nationale sur l'utilisation des MIR. Le Canada commencerait par les quatre catégories de MIR décrites ci‑dessus, et la réglementation pourrait être modifiée au fil du temps afin de tirer parti des technologies émergentes et novatrices.

En plus de préciser les types de MIR qui peuvent être utilisés au Canada, les modifications législatives potentielles permettraient au gouvernement fédéral d'imposer des conditions ou des restrictions par voie de règlement qui devraient être respectées lors de l'utilisation d'une MIR. Par exemple, la salinité de l'eau peut influencer l'efficacité d'une MIR, et la nécessité d'une condition générale pour guider ou limiter son utilisation à certains environnements ou circonstances.

Obligation de déterminer en premier lieu l'avantage environnemental net d'une MIR

Comme les conditions de déversement varient et que certaines MIR peuvent être plus appropriées que d'autres dans certaines circonstances, le cadre national envisagé comprendrait comme pierre angulaire une disposition établissant, comme condition préalable à toute autorisation, qu'il a été déterminé que l'utilisation d'une MIR donnée entraînera probablement un avantage environnemental global ou « net » par rapport à sa non‑utilisation. Des processus décisionnels semblables sont utilisés dans d'autres pays, comme les États‑Unis, le Royaume‑Uni, l'Australie et la Norvège, et le Canada mettra en place une approche décisionnelle garantissant l'application de mesures de protection de l'environnement équivalentes ou supérieures à celles des autres pays.

La détermination de l'avantage net pour l'environnement exige de comparer les avantages, les inconvénients et les compromis liés à l'utilisation d'une MIR, ainsi que la mise en œuvre de toute stratégie d'atténuation des risques. La comparaison serait fondée sur les meilleures informations disponibles concernant le déversement, notamment le type, le volume et l'emplacement du pétrole déversé, les conditions météorologiques, les sensibilités environnementales et les répercussions socioéconomiques, culturelles et communautaires potentielles. Par exemple, selon les circonstances propres à l'incident, il peut être préférable d'utiliser une ou plusieurs MIR pour protéger un littoral contre les répercussions à long terme de l'hydrocarbure déversé, même si cela signifie qu'il y aura des répercussions à court terme sur les espèces dans la colonne d'eau ou en aval (voir l'annexe A pour consulter le résumé des avantages des MIR, des éléments à prendre en compte et des options d'atténuation). Les modifications possibles permettraient également d'établir d'autres exigences sur la façon de déterminer l'avantage environnemental net.

Pour appuyer la détermination de l'avantage environnemental net, le gouvernement envisage également d'être en mesure d'autoriser l'utilisation d'un essai à petite échelle d'une MIR pour en vérifier et tester l'efficacité, compte tenu des conditions particulières du déversement et du type d'hydrocarbures déversés.

Clarification de la responsabilité et de l'indemnisation afin d'inclure les MIR

La responsabilité et l'indemnisation en cas de déversement d'hydrocarbures sont fondées sur le principe du pollueur‑payeur selon lequel le pollueur est responsable d'un déversement d'hydrocarbures et de l'intervention qui s'en suit, ainsi que des coûts de nettoyage et des dommages, comme les dommages matériels et les pertes économiques (par exemple la perte de revenus pour les entreprises).

Le Gouvernement du Canada ne propose pas de modifier la responsabilité pour les dommages causés par un déversement d'hydrocarbures. Les modifications envisagées préciseraient plutôt que le régime actuel de responsabilité et d'indemnisation inclurait les MIR dans son champ d'application.

Surveillance et application de la loi

Le gouvernement fédéral ou l'organisme de réglementation responsable sont actuellement chargés de vérifier et de surveiller la conformité aux règlements et aux normes de façon continue, et de prendre des mesures pour faire appliquer ces règlements et normes en cas de non‑conformité. Comme pour toute opération d'intervention en cas de déversement d'hydrocarbures, l'organisme responsable approprié surveillera l'application des MIR tout au long de l'intervention.

Les modifications envisagées indiqueraient clairement que le non‑respect de toute exigence législative ou réglementaire, ou d'une condition, concernant les MIR constituerait une infraction et pourrait donner lieu à des mesures d'application de la loi par les ministères ou organismes de réglementation fédéraux.

Conclusion

Le Canada dispose de solides régimes d'intervention qui ont fait leurs preuves dans la prévention des déversements d'hydrocarbures. Cependant, le risque ne peut être éliminé et le Canada étudie comment se préparer le plus efficacement possible à réagir aux déversements d'hydrocarbures. Il s'agit notamment d'accroître l'accès des intervenants à une gamme d'outils et de techniques de lutte contre les déversements d'hydrocarbures reconnus à l'échelle internationale, comme les MIR. Leur utilisation serait guidée par une évaluation minutieuse des avantages, des inconvénients et des compromis liés à l'utilisation d'une MIR donnée, afin de déterminer si elle est susceptible d'entraîner un avantage net pour l'environnement.

Le Gouvernement du Canada envisage d'effectuer des modifications législatives pour établir un cadre national permettant une utilisation prudente et appropriée des MIR. Les modifications envisagées permettraient de mettre en place une série de garanties juridiques, en plus des protections environnementales existantes et des solides systèmes actuels d'intervention en cas de déversement.

Les modifications législatives potentielles, si elles sont approuvées par le Parlement, seraient accompagnées de règlements et d'activités de programme connexes, ainsi que de recherches scientifiques et de lignes directrices supplémentaires. D'autres possibilités de fournir de la rétroaction sur les éléments du régime seraient offertes lors de l'élaboration de ces règlements et des activités du programme.

Si vous avez des commentaires sur les modifications législatives proposées, veuillez les envoyer à l'adresse électronique suivante : AlternativeResponseMeasures‑Mesuresdinterventionderechange@tc.gc.ca.

Annexe A : Résumé des avantages, des éléments à prendre en considération et des stratégies d'atténuation des risques liés aux mir

MIR potentielles Avantages Considérations Stratégies d'atténuation des risques
Agents de traitement des déversements (surtout les agents dispersants)
  • Améliorent l'élimination des hydrocarbures de la surface de l'eau afin de les empêcher d'atteindre les rivages et de se répandre sur les surfaces.
  • Diluent rapidement les hydrocarbures à de très faibles concentrations.
  • Améliorent la biodégradation naturelle.
  • Les déversements importants peuvent être traités par déploiement aérien pour couvrir de grandes zones rapidement, dans des endroits éloignés et dans un large éventail de conditions environnementales.
  • Les déversements sous‑marins peuvent être traités à la source dans de nombreuses conditions, comme la nuit et en cas de mauvaise visibilité et de mer agitée.
  • Peuvent favoriser la santé et la sécurité des intervenants lorsqu'ils se rendent sur les lieux du déversement en supprimant les émissions de substances volatiles.
  • Exposition accrue des organismes aux hydrocarbures dans la colonne d'eau.
  • Conviennent uniquement à certains types d'hydrocarbures, dans certaines conditions.
  • Période de temps limitée pour une utilisation efficace.
  • À utiliser seulement dans le cadre d'une stratégie de protection de l'environnement après une évaluation minutieuse des avantages et des conséquences pour les espèces et les habitats.
  • Appliquer uniquement dans des endroits où la capacité de dilution est suffisante.
  • Surveiller l'efficacité du dispersant pour disperser la nappe d'hydrocarbures (à la surface de l'eau) ou le panache (dans la colonne d'eau).
Décantation
  • Réduit les contraintes opérationnelles associées au stockage, à la manutention et au traitement de l'eau séparée des hydrocarbures récupérés.
  • Augmente l'efficacité des interventions en prolongeant le temps consacré à la récupération des hydrocarbures, en particulier dans les endroits où les infrastructures et les ressources d'intervention sont limitées.
  • Peut être utilisé efficacement avec la plupart des produits pétroliers.
  • Une certaine quantité d'hydrocarbures résiduels est retournée avec l'eau.
  • Surveiller la teneur en hydrocarbures dans les rejets d'eau.
  • Rejeter l'eau dans la zone déjà touchée par le déversement d'hydrocarbures.
Brûlage in-situ
  • Élimine rapidement de grandes quantités d'hydrocarbures de la surface de l'eau.
  • Réduit le besoin d'entreposage, de manutention et de traitement des hydrocarbures récupérés.
  • Efficace sur presque tous les produits pétroliers combustibles flottants dans des conditions contrôlées.
  • Peut être effectué dans des conditions où d'autres options ne conviennent pas, comme les marais, les zones terrestres et la glace brisée.
  • Réduction localisée et à court terme de la qualité de l'air et des effets thermiques.
  • Les résidus du brûlage peuvent être difficiles à récupérer.
  • Nécessite l'utilisation d'une méthode pour contenir et concentrer les hydrocarbures, physiquement ou chimiquement, comme un barrage résistant au feu, des repousseurs ou des canaux dans la glace.
  • Nécessite des conditions environnementales calmes.
  • L'ajout d'un accélérant peut être nécessaire pour l'allumage.
  • Les animaux sauvages peuvent être piégés dans la zone brûlée.
  • Possibilité de perte de contrôle causant des incendies secondaires.
  • Sélection minutieuse du site et des conditions de combustion pour les opérations et la sécurité.
  • Marges de recul suffisantes par rapport aux zones habitées et à la faune, notamment pour le panache de fumée prévu.
  • Solides contrôles au sein de la zone opérationnelle.
  • Surveillance de la qualité de l'air et de la présence d'espèces sauvages.
Translocation des hydrocarbures
  • Un moyen efficace de réduire la quantité d'hydrocarbures échoués sur les rivages et les structures.
  • Les hydrocarbures peuvent être récupérés, ce qui accroît la biodégradation naturelle.
  • Réduit l'exposition à long terme des espèces riveraines aux hydrocarbures échoués.
  • L'intrusion physique pour déplacer des matériaux souillés pourrait avoir une incidence sur les écosystèmes riverains.
  • Augmentation localisée et à court terme de l'exposition au pétrole le long des rives et des près des rives.
  • Sélection de la technique de translocation appropriée aux caractéristiques de la région riveraine.
  • Évaluation des avantages de l'élimination des matières enduites d'hydrocarbures comparativement à la dégradation naturelle.
  • Suivi de l'efficacité de la technique de translocation utilisée.