Contexte
La navigation de plaisance est une activité populaire au Canada; pas moins de 12,4 millions de Canadiens et de Canadiennes se livrent à ce type d’activité chaque année. Malheureusement, la popularité de cette activité entraîne aussi un nombre élevé d’incidents de sécurité. Le Canada recense en moyenne 111 décès associés à la navigation de plaisance chaque année. Il s’agit du nombre de décès le plus élevé dans le secteur maritime.
Le fait de ne pas porter un vêtement de flottaison individuel (VFI) ou un gilet de sauvetage est l’une des principales causes de décès parmi les plaisanciers (89 % des décès). Bien que le taux de décès varie d’une année à l’autre, il n’y a pas eu de tendance constante à la baisse.
Le Règlement sur les petits bâtiments (RPB) de Transports Canada exige qu’un VFI ou qu’un gilet de sauvetage de taille adéquate soit transporté pour chacune des personnes à bord de l’embarcation de plaisance; toutefois, le RPB ne les oblige pas à les porter, sauf dans certaines circonstances. Les dernières consultations publiques sur l’obligation de porter un gilet de sauvetage ou un VFI à bord d’une embarcation de plaisance ont eu lieu en 2009-2010 lors de la réunion nationale du Conseil consultatif maritime canadien. À cette occasion, aucun consensus n’a été obtenu parmi les parties prenantes pour ce qui est de l’introduction d’exigences réglementaires visant le port de VFI ou de gilets de sauvetage.
À l’échelle internationale, d’autres compétences maritimes comme celle de l’Irlande, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande imposent le port obligatoire de VFI et de gilets de sauvetage dans certaines circonstances (p. ex., en fonction de l’âge de l’utilisateur ou de l’invité, du type de bâtiment ou de sa taille, et des situations de risque accru). Les données disponibles montrent que ces exigences ont largement contribué à réduire le nombre de décès, surtout lorsqu’elles visent des situations dont le danger pour les plaisanciers est attesté. Par exemple, quand l’État de Victoria (en Australie) a imposé le port obligatoire de VFI et de gilets de sauvetage pour tous les plaisanciers de moins de 10 ans, pour tous les plaisanciers à bord d’un bateau à moteur d’une longueur de moins de 5 mètres, et pour tout plaisancier qui utilise un bâtiment à propulsion humaine, le taux de noyade pour cet État a chuté de 67 % en l’espace de cinq ans.
Intervention d’un spécialiste du comportement
Les travaux visant à réexaminer le port obligatoire de vêtements de flottaison individuels (VFI) ou de gilets de sauvetage à bord des embarcations de plaisance ont été amorcés en 2018 pour répondre à l’intérêt grandissant des intervenants et du public à l’égard de cette question et pour étudier le taux systématiquement élevé de décès parmi les plaisanciers.
En 2019, Transports Canada a commencé à collaborer avec un spécialiste du comportement du Bureau du Conseil privé pour mener un projet de recherche sur la question du port obligatoire de VFI et de gilets de sauvetage. Ce projet visait à examiner le port de VFI et de gilets de sauvetage, à identifier les groupes démographiques qui portent ou ne portent pas le plus souvent les VFI ou des gilets de sauvetage dans certaines circonstances, et ce tout en découvrant les motifs pour ou contre le port de VFI et de gilets de sauvetage parmi les plaisanciers. Le projet était composé d’un sondage en ligne pour évaluer les perceptions qu’avaient les plaisanciers des VFI et des gilets de sauvetage (terminé en 2020) ainsi que d’observations sur les lieux par des agents de sécurité nautique (terminé en 2021) dont le but était de recenser le nombre de personnes qui portaient des VFI ou des gilets de sauvetage en fonction du groupe démographique et de mesurer les répercussions de divers facteurs (conditions météorologiques, température, type de bâtiment, etc.) sur le taux de port.
Sondage en ligne
Environ 2 000 personnes ont répondu au sondage en ligne sur une période de quatre mois; au total, 47,8 % des répondants ont déclaré qu’ils portaient toujours un VFI ou un gilet de sauvetage lorsqu’ils pratiquaient la navigation de plaisance. Les réponses variaient considérablement en fonction du niveau de compétence déclaré par les répondants et du type de bâtiment qu’ils utilisent. Cependant, peu importe leur niveau de compétence, les participants convenaient généralement qu’il était irresponsable de ne pas porter un dispositif quelconque de flottaison.
Port de VFI ou de gilets de sauvetage en fonction du niveau de compétence
« Je porte un VFI ou un gilet de sauvetage en tout temps »
Perception des plaisanciers en fonction de leur niveau de compétence : il est irresponsable de ne pas porter un VFI ou un gilet de sauvetage
Observations sur les lieux
Les observations sur les lieux ont été réalisées au cours de la saison de navigation de 2021, sur divers plans d’eau. Dans le cadre de leurs observations, les agents de sécurité nautique ont visité 10 marinas partout au pays, toutes les deux semaines, pour consigner le taux de port de VFI et de gilets de sauvetage parmi les plaisanciers à bord de différents types de bâtiments, s’adonnant à différentes activités. Les observateurs ont utilisé une variété d’outils pour faire un suivi des conditions météorologiques susceptibles d’influer sur le taux de port (vitesse du vent, température de l’eau, etc.) et ont consigné tous les changements observés que ces conditions ont eus sur les comportements.
Les résultats de ces observations ont été comparés aux résultats du sondage en ligne afin de brosser un portrait situationnel du port de VFI et de gilets de sauvetage par les Canadiens et Canadiennes. Voici les principales constatations :
- 34 % des plaisanciers observés lors de visites sur les lieux portaient un VFI ou un gilet de sauvetage.
- Le taux de port de VFI et de gilets de sauvetage parmi les mineurs (âgés de moins de 18 ans) était presque le double de celui des adultes (67 % des jeunes comparativement à 29 % des adultes).
- Le taux de port était le plus élevé parmi les enfants de 6 à 12 (75 %).
- Le taux de port de VFI et de gilets de sauvetage était légèrement plus élevé chez les femmes que chez les hommes (38 % des femmes comparativement à 31 % des hommes).
- Le taux de port variait considérablement en fonction du type de bâtiment, mais on a constaté qu’il était plus élevé à bord de petits bâtiments comparativement aux grands bâtiments.
- Pour ce qui est des bâtiments à propulsion humaine, les résultats variaient considérablement : le taux de port était élevé parmi les kayakistes (78 %), mais beaucoup plus faible parmi les canoéistes (41 %).
- Les passagers à bord des embarcations de plaisance étaient beaucoup plus susceptibles (46 fois plus susceptibles) de porter un VFI ou un gilet de sauvetage lorsque le conducteur en portait un.
Taux général de port
Taux de port en fonction de l’âge des plaisanciers
Taux de port en fonction de la taille du bâtiment
Taux de port en fonction du type de bâtiment
Observations aériennes du Conseil canadien de la sécurité nautique
Parallèlement aux observations menées par Transports à l’été 2021, le Conseil canadien de la sécurité nautique a collaboré avec la Police provinciale de l’Ontario pour observer le taux de port de VFI et de gilets de sauvetage parmi les plaisanciers dans de multiples lacs du sud de l’Ontario. À la différence des observations de Transports Canada, menées par des observateurs munis de jumelles à partir du rivage, les observations du Conseil canadien de la sécurité nautique étaient menées à bord d’aéronefs pour observer les plaisanciers naviguant à une grande distance du rivage, souvent dans des conditions d’isolement relatif.
Malgré la distance qui les sépare du rivage, les résultats de cette initiative ont fait écho à ceux de Transports Canada; les observations aériennes ont permis d’enregistrer un taux de port de 33 % parmi les plaisanciers. De plus, ces observations ont permis de tirer des conclusions similaires concernant le taux de port élevé parmi les jeunes ainsi que le type de bâtiment ou la taille de bâtiment à bord duquel les plaisanciers étaient moins susceptibles de porter un VFI ou un gilet de sauvetage.
Rapport sur les décès liés à la navigation de plaisance
En 2021, grâce à un financement versé par le Programme de contribution à la sécurité nautique de Transports Canada, le Centre de recherche sur la prévention de la noyade du Canada a produit un rapport de suivi sur les décès associés à la navigation de plaisance au Canada, de 2008 à 2017. Ces données avaient été puisées des rapports de bureaux de coroners partout au pays. Elles ont permis de constater, entre autres détails, à quel groupe démographique appartenaient les victimes, la taille du bâtiment et le type de bâtiment qu’elles utilisaient au moment de l’incident, et si elles portaient ou non un VFI ou un gilet de sauvetage.
Les principales constatations du rapport sont les suivantes :
- La majorité des personnes qui sont décédées à la suite d’un incident de navigation de plaisance ne portaient pas de VFI ou de gilet de sauvetage au moment de l’incident.
- Les décès ont principalement eu lieu parmi les adultes, dont la majorité étant des hommes.
- La plupart des décès associés à la navigation de plaisance impliquaient l’utilisation d’un bateau à moteur. Le canot était le deuxième bâtiment le plus couramment impliqué dans un incident mortel.
- L’incident mortel le plus commun était en premier lieu le chavirement d’un bâtiment suivi par la chute par-dessus bord ou le fait d’être projeté par-dessus bord.