Transport de vaccins utilisant de grandes quantités de dioxyde de carbone solide (glace carbonique ou glace sèche) - Alerte à la Sécurité de l’Aviation civile (ASAC) 2020-15

À l’attention de :

Les exploitants aériens commerciaux

Numéro de classification du dossier : Z 5000-35
Numéro du SGDDI 17113410
Numéro de document : ASAC 2020-15
Numéro d'édition : 01
Date d'entrée en vigueur : 2020-12-30

Objet :

Cette alerte à la sécurité de l’aviation civile (ASAC) fournit des informations et des recommandations aux exploitants commerciaux en ce qui concerne les précautions de sécurité à prendre lors du transport aérien de vaccins, un transport qui pourrait exiger du dioxyde de carbone solide (glace carbonique ou glace sèche) en quantités plus importantes que la normale, à des fins de préservation.

Contexte :

Les fournisseurs internationaux de vaccins commencent à livrer les expéditions initiales du vaccin contre la COVID-19 au Canada. On prévoit que l'effort international visant à distribuer rapidement des vaccins dans le monde entier entraînera une demande sans précédent pour ce type de cargaison. En tant que partie intégrante de la chaîne d'approvisionnement de ces expéditions, les exploitants commerciaux canadiens peuvent être tenus de transporter ces vaccins à une température de -70°C pour une conservation adéquate. Des méthodes de transport utilisant de la glace carbonique ont été développées pour répondre à ces exigences de température. Bien que la glace carbonique soit régulièrement et en toute sécurité utilisée pour transporter des denrées périssables, les exploitants peuvent prévoir de transporter des quantités de glace carbonique plus importantes que la normale pendant cet effort de vaccination. Ce volume de glace carbonique plus important que la normale peut présenter des risques dont les procédures existantes des exploitants aériens pourraient ne pas tenir compte de façon adéquate.

La glace carbonique se sublime continuellement (passe directement d'un solide à un gaz) à des températures supérieures à -78°C sous pression atmosphérique standard. À des pressions réduites, et tous les autres facteurs étant égaux, le taux de sublimation de la glace carbonique augmente. Un risque potentiel associé à la sublimation de la neige carbonique est l'augmentation de la concentration de dioxyde de carbone gazeux (CO2) qui remplacera l'oxygène dans les compartiments d'avion et affectera progressivement la santé des occupants.

Les symptômes d'une exposition légère au CO2 peuvent inclure des maux de tête et de la somnolence. À des concentrations plus élevées de CO2 gazeux, une respiration rapide, de la confusion, une augmentation du débit cardiaque, une pression artérielle élevée et une augmentation des arythmies peuvent survenir. La gravité des symptômes dépend de la concentration de CO2 et de la durée pendant laquelle une personne y est exposée.

Respirer de fortes concentrations de CO2 gazeux peut entraîner une dégradation non détectée du fonctionnement cognitif et présenter un risque d'asphyxie. Des concentrations élevées de CO2 gazeux peuvent être anticipées dans les zones adjacentes à la cargaison avec de la glace carbonique en sublimation, de telle sorte qu'elles peuvent affecter l'équipage de conduite pendant les vols et l'équipage au sol qui s’occupe du chargement et du déchargement de la cargaison. Le risque de concentrations dangereuses de CO2 gazeux augmente proportionnellement avec la quantité de glace carbonique transportée, le taux de sublimation de cette glace carbonique (variable dépendant de la température et de la pression ambiante), le temps d'exposition et le niveau de dégradation du système de ventilation de l'aéronef.

Des informations supplémentaires concernant la glace carbonique sont disponibles à l'annexe A de cette ASAC.

Mesures recommandées :

Lorsqu'ils se préparent à transporter une cargaison contenant de grandes quantités de dioxyde de carbone solide (glace carbonique), les exploitants devraient tenir compte des informations contenues dans cette ASAC. De plus, les exploitants disposant d'un système de gestion de la sécurité (SGS) approuvé doivent effectuer des évaluations des risques pour la sécurité conformément à leur SGS. Les exploitants qui n’ont pas de SGS approuvé devraient mener une évaluation des risques et appliquer des mesures d'atténuation des risques appropriées. L'évaluation des risques doit tenir compte des procédures de sécurité qui peuvent être nécessaires compte tenu de la quantité de glace carbonique transportée, du temps de vol et des recommandations du constructeur de l'aéronef.

Transports Canada recommande aux exploitants aériens de considérer les faits et conseils suivants :

  1. Que les constructeurs d’aéronefs fournissent des informations sur les quantités maximales de glace carbonique recommandées, que le ou les systèmes de ventilation de l’avion peuvent accepter, en fonction du taux de sublimation de la glace carbonique de cette cargaison.
  2. Une détermination précise du taux de sublimation de la glace carbonique est nécessaire pour déterminer la quantité de glace carbonique qui peut être transportée en toute sécurité à bord d'un aéronef.
  3. Au fur et à mesure que la glace carbonique se sublime, une perte de poids se produit, affectant le centre de gravité de l'aéronef.
  4. Que la mise en service se fasse avec des systèmes de contrôle de l’environnement entièrement opérationnels, incluant tous les packs de climatisation et les groupes auxiliaires de puissance, pour permettre une ventilation efficace pour les opérations au sol et les imprévus en vol. Les mêmes recommandations s’appliquent pour les systèmes de ventilation et les composants associés des aéronefs non pressurisés.

    Note 1 : Faire fonctionner les systèmes de climatisation au débit maximum peut entraîner un risque supplémentaire lors de l'ouverture des portes en raison d'une éventuelle surpression résiduelle. L'exploitant doit tenir compte de ce danger lors de la rédaction des procédures opérationnelles pour le transport des vaccins.

    Note 2 : L'exploitant devrait considérer le cas d'augmentation de concentration de CO2 dans la cabine comme une situation d'urgence possible et devrait développer une procédure exigeant le port de masques à oxygène pour la durée restante du vol.

    Note 3 : L'exploitant devrait considérer l'utilisation d’unités externes de conditionnement de l’air au lieu du système de climatisation à bord lorsque l'avion est au sol et à l'arrêt.
  5. Les détecteurs de CO2 installés ou transportés dans l'avion, ou portés par l'équipage de conduite et les autres membres de l'équipage aideront l'exploitant et l'équipage à reconnaître des concentrations dangereuses de CO2 et à mettre en œuvre des mesures de contrôle des risques efficaces.
  6. La formation des membres d'équipage de conduite sur des conditions et des procédures spécifiques peut améliorer la prise de décision en cas d'alerte d'un détecteur de CO2 ou d'autres anomalies du système.
  7. Une ventilation maximale, y compris pendant le processus de dégivrage et d'antigivrage au sol, atténuera l'accumulation de CO2 dans l'avion.

Documents de référence :

  1. Circulaire d’information de la Federal Aviation Administration (FAA AC) No 91-76A Modification 1 — Hazard Associated with Sublimation of Solid Carbon Dioxide (Dry Ice) Aboard Aircraft
  2. DOT/FAA/AM-06/19 — Sublimation Rate of Dry Ice Packaged in Commonly Used Quantities by the Air Cargo Industry — Août 2006, Bureau de la médecine aéronautique (Office of Aerospace Medicine), Washington, DC 20591
  3. International Air Transport Association) (IATA) — Guidance for Vaccine and Pharmaceutical Logistics and Distribution — Édition 2, 16 décembre 2020
  4. Organization de l’aviation civile internationale (OACI) — Safe transport of COVID-19 vaccines on commercial aircrafthttps://www.icao.int/safety/OPS/OPS-Normal/Pages/Vaccines-Transport.aspx (en anglais seulement) — 21 décembre 2020

Annexe A Informations sur la glace carbonique et le CO2 gazeux

La glace carbonique et ses dangers :

La glace carbonique (ou glace sèche) est du dioxyde de carbone (CO2) sous forme solide (congelé), pressé en blocs secs ou en granulés utilisés comme réfrigérant pour emballer des articles qui doivent rester froids ou congelés pendant le transport, tels que des échantillons biologiques, des vaccins ou des denrées alimentaires.

La glace carbonique peut être dangereuse dans les espaces clos mal ventilés en raison de l'inhalation ou de la surexposition au CO2; le contact de la peau avec de la glace carbonique peut provoquer des gelures.

Lorsque la glace carbonique fond, elle ne s'accumule pas sur le sol et ne forme pas de flaque d'eau; elle se sublime, c’est-à-dire qu’elle passe directement de la forme solide à la forme gazeuse.

Le CO2 gazeux et ses dangers :

Le CO2 gazeux est :

  • un composant naturel de l'atmosphère (0,04%);
  • Un gaz respiratoire physiologique;
  • Incolore, inodore et ininflammable; et
  • 1,5 fois plus lourd que l'air et a tendance à s'accumuler près du sol.

Des niveaux accrus de CO2 provoquent de la somnolence; des concentrations plus élevées augmentent la fréquence et la profondeur de la respiration et de la fréquence cardiaque.

À des concentrations encore plus élevées, le CO2 gazeux est à la fois un agent asphyxiant et un agent toxique. Il provoque une suffocation en déplaçant et en diluant la quantité d'oxygène (O2) dans l'air, conduisant à une hypoxie (manque d'oxygène) et il est toxique pour le fonctionnement du cerveau.

La différence entre la surexposition au CO2 gazeux et l’hypoxie :

Les symptômes de la surexposition au CO2 sont différents des symptômes de l’hypoxie. L'équipage de conduite ne devrait pas se fier aux symptômes typiques de l’hypoxie (par exemple essoufflement, bâillements excessifs, euphorie, et fatigue) pour détecter une surexposition au CO2. La formation habituelle de sensibilisation à l'hypoxie N'EST PAS une formation à la surexposition au CO2 gazeux.

Les symptômes de la surexposition au CO2 et ses effets sur la santé :

  • 0,04% de CO2 (400 ppm) : niveaux typiques de CO2 dans l'air extérieur; aucun symptôme physiologique.
  • 0,5% de CO2 (5 000 ppm) : limite réglementaire de Transports Canada pour les aéronefs de la catégorie transport (AWM 525.831); symptômes physiologiques subtils ou inexistants.
  • 1% de CO2 (10 000 ppm) : somnolence.
  • 2% de CO2 (20 000 ppm) : maux de tête et difficultés respiratoires pendant l'effort.
  • 3% de CO2 (30 000 ppm) : somnolence légère, audition réduite, transpiration, accélération du rythme cardiaque, difficulté à respirer au repos.
  • 5% de CO2 (50 000 ppm) : léthargie, vertiges, confusion, respiration rapide / essoufflement (incapacité notable à respirer suffisamment vite et profondément).
  • 8% de CO2 (80 000 ppm) : vision réduite, tremblements / contractions musculaires et perte de conscience.
  • >10% de CO2 (100 000 ppm) : perte de conscience immédiate, convulsions et mort imminente.

Effets de la sublimation de la glace carbonique sur le transport aérien :

  • Les taux de sublimation recommandés dans la circulaire FAA AC 91-76A, Hazard Associated with Sublimation of Solid Carbon Dioxide (Dry Ice) Aboard Aircraft (« Dangers associés à la sublimation du dioxyde de carbone solide (glace carbonique) à bord des aéronefs »), sont établis dans un ensemble de conditions spécifiques. Si les conditions d’exploitation ne sont pas les mêmes, le taux de sublimation réel sera différent.
  • Une pression réduite, par exemple une altitude cabine de 8000 pieds, augmente le taux de sublimation.
  • La réduction de la pression dans la cabine entraîne une formation de CO2 gazeux à partir des colis, augmentant la concentration de CO2 dans le compartiment. Pour cette raison, les procédures existantes relatives à l’évacuation de la fumée, du feu ou d’autres vapeurs ne doivent pas être utilisées à moins qu'elles ne soient modifiées pour tenir compte de ce phénomène.
  • À la fin d'un vol, les compartiments contenant de la glace carbonique ont tendance à avoir une concentration élevée de CO2 qui peut prendre plusieurs minutes à se dissiper. Lorsque la porte de chargement est ouverte, la zone immédiatement à l'extérieur de la porte connaitra également une concentration élevée de CO2 pendant plusieurs minutes.

Bureau responsable:

Pour davantage de renseignements à ce sujet, veuillez communiquer avec un Centre de Transports Canada ou avec Nilvio Vezzaro, Gestionnaire des Normes de conception des aéronefs à Ottawa, par courriel à nilvio.vezzaro@tc.gc.ca.

Document original signé par

Félix Meunier
Directeur
Direction des normes

L’Alerte à la Sécurité de l’Aviation Civile (ASAC) de Transports Canada sert à communiquer des renseignements de sécurité importants et contient des mesures de suivi recommandées. Une ASAC vise à aider le milieu aéronautique dans ses efforts visant à offrir un service ayant un niveau de sécurité aussi élevé que possible. Les renseignements qu’elle contient sont souvent critiques et doivent être transmis rapidement par le bureau approprié. L’ASAC pourra être modifiée ou mise à jour si de nouveaux renseignements deviennent disponibles.