Avis de navigabilité, B017, édition 2

Avis de navigabilité - B017, édition 2 - 5 novembre 2004

Le concept de l'aéronef propre

(Le présent Avis de navigabilité remplace l'AN nº B017 édition 1 du 6 juin 1994.)

Le Règlement de l'aviation canadien (RAC) interdit le décollage si du givre, de la glace ou de la neige adhère aux surfaces critiques de l'aéronef. Cette interdiction est connue sous l'appellation de «Concept de l'aéronef propre». Le maintien de la sécurité des vols dépend essentiellement de ce concept.

Lorsqu'il est raisonnable de croire que du givre, de la glace ou de la neige risquent d'adhérer à l'aéronef, le Règlement de l'aviation canadien exige qu'une ou plusieurs inspections soient faites avant le décollage ou la tentative de décollage. Il prescrit aussi le type et le nombre minimum d'inspections à effectuer selon que l'exploitant possède ou non un programme approuvé pour opérations dans des conditions de givrage au sol tiré de la Norme sur les opérations dans des conditions de givrage au sol, tel que le précise la norme 622.11 du RAC - Normes relatives aux règles d'utilisation et de vol des aéronefs.

Il est primordial qu'il n'y ait aucune tentative de décollage, quel que soit l'aéronef, tant que le commandant de bord n'a pas établi que tous les composants critiques de l'aéronef sont libres de givre, de glace ou de neige. Il peut satisfaire à cette exigence en obtenant la confirmation que l'aéronef est prêt pour le vol d'un membre du personnel compétent et formé à cet effet.

Parmi les nombreuses méthodes utilisées pour se conformer au Concept de l'aéronef propre, la seule capable d'assurer la sécurité du vol dans des conditions de givrage, est celle qui consiste à inspecter minutieusement, avant le décollage et sans tenir compte des procédures de dégivrage et d'antigivrage utilisées, les surfaces critiques de l'aéronef pour s'assurer qu'elles sont propres.

Dans toutes les opérations aériennes, le commandant de bord a l'ultime responsabilité de décider si l'aéronef est en état de voler en toute sécurité.

Contaminants gelés

Des données expérimentales indiquent que les formations de givre, de glace ou de neige d'une épaisseur et d'une rugosité de surface semblables à celles d'un papier de verre moyen ou gros, qui se trouvent sur le bord d'attaque et l'extrados, peuvent réduire la portance de l'aile jusqu'à 30 % et accroître la traînée jusqu'à 40 %. Même de petites quantités de contamination comme celles-là ont causé et continuent de causer des accidents d'aéronefs, avec les dommages importants et les pertes de vie que l'on sait. La diminution de la portance provient en grande partie de la contamination du bord d'attaque. Les changements affectant la portance et la traînée augmentent de façon notable la vitesse de décrochage, réduisent la pilotabilité et modifient les caractéristiques de vol de l'aéronef. Des accumulations plus épaisses ou plus rugueuses de contaminants gelés peuvent avoir des effets encore plus néfastes sur la portance, la traînée, la vitesse de décrochage, la stabilité et la maîtrise de l'aéronef.

On a identifié plus de 30 facteurs susceptibles d'influer sur l'accumulation de givre, de glace ou de neige, sur la rugosité de la surface d'un aéronef et sur les propriétés d'antigivrage des liquides abaisseurs du point de congélation (FPD). Ces facteurs comprennent notamment la température ambiante; la température de la surface de l'aéronef; le type, la température et la concentration du liquide dégivrant ou antigivrant; l'humidité relative; et la vitesse et la direction du vent. Comme de nombreux facteurs influent sur l'accumulation de contaminants gelés à la surface de l'aéronef, les données sur les délais d'efficacité des liquides FPD ne devraient servir qu'à titre indicatif, à moins de renseignements contraires dans le programme de l'exploitant. Le délai d'efficacité consiste en l'estimation de la période de temps au cours de laquelle les liquides de dégivrage/d'antigivrage empêchent avec efficacité la formation de givre ou de glace ou l'accumulation de neige sur les surfaces traitées. Ce délai d'efficacité correspond à une mesure du temps qui débute au moment de l'application finale d'un liquide de dégivrage/d'antigivrage approuvé et qui se termine quand le liquide a perdu toute efficacité. Précisons qu'un liquide a perdu toute efficacité quand il n'est plus en mesure d'absorber la moindre précipitation, ce qui se traduit par une accumulation visible de contamination à la surface.

Le genre de givre, de glace ou de neige qui peut s'accumuler sur un aéronef au sol constitue un facteur clé pour déterminer le type de procédure de dégivrage ou d'antigivrage à utiliser.

Le givre doit être enlevé avant le décollage. Il se forme souvent du givre autour des cellules des réservoirs de carburant structuraux, surtout après un vol ou après l'avitaillement. On peut éliminer le givre en remisant l'aéronef dans un hangar chauffé ou en recourant à un autre procédé normal de dégivrage. Dans certains cas, il est possible de décoller malgré la présence de givre sur l'intrados des ailes, à condition de respecter les instructions du constructeur de l'aéronef.

Lorsque les conditions sont telles qu'il est raisonnable de croire que de la glace ou de la neige risque d'adhérer à l'aéronef, cette accumulation doit être enlevée avant le décollage. Une neige sèche et poudreuse peut être délogée en soufflant de l'air froid ou de l'azote gazeux comprimé sur toute la surface de l'aéronef. Dans certaines circonstances, on peut se servir d'un balai pour nettoyer les parties accessibles depuis le sol. Une neige lourde et humide ou de la glace peut être délogée en remisant l'aéronef dans un hangar chauffé, en utilisant des solutions d'eau chaude et de liquides FPD, en recourant à un moyen mécanique comme des balais ou des racloirs ou encore en utilisant une combinaison de ces trois méthodes. Si l'aéronef est remisé dans un hangar chauffé, il faut s'assurer qu'il est complètement sec avant de le sortir à l'extérieur, sinon l'eau restée emprisonnée risque de geler de nouveau dans des zones ou sur des surfaces critiques de l'aéronef.

Le phénomène de l'aéronef imprégné de froid

Lorsque les réservoirs de carburant sont logés dans les ailes des avions, la température du carburant a un effet important sur la température de la surface de l'aile au-dessus et en-dessous des réservoirs. Après un vol, la température d'un aéronef et du carburant qu'il transporte dans ses réservoirs d'aile peut être considérablement plus froide que la température ambiante. Les ailes imprégnées de froid d'un aéronef refroidissent les précipitations qui s'y déposent de sorte que, en fonction d'un certain nombre de facteurs, du verglas peut se former sur certains aéronefs et en particulier sur la partie des ailes qui se trouve au-dessus des réservoirs de carburant. Ce type de glace est difficile à voir et il est souvent nécessaire de toucher l'aile à main nue ou d'utiliser un détecteur de glace spécial. Une couche de neige fondante sur l'aile peut également dissimuler une couche de glace dangereuse.

La formation de glace sur l'aile est fonction de la sorte de précipitation, de l'épaisseur et de la teneur en eau des précipitations, de la température ambiante et de la température de la surface de l'aile. Les facteurs suivants contribuent à l'intensité de la formation et à l'épaisseur finale de la couche de verglas :

- la basse température du carburant ayant servi à faire le plein des réservoirs de l'aéronef au cours d'une escale ou la longue durée du vol précédent, ou les deux, qui fait baisser sous zéro la température du carburant résiduel dans les réservoirs d'aile. Des baisses de température de l'ordre de 120 à 180C ont déjà été enregistrées après un vol de deux heures;
- une quantité résiduelle anormalement importante de carburant froid dans les réservoirs d'aile qui fait monter le niveau de carburant au point où il y a contact avec les panneaux d'extrados de l'aile, particulièrement à l'emplanture d'aile;
- pendant l'escale, des conditions météorologiques telles que de la neige humide, de la bruine ou de la pluie, conjuguée à une température ambiante approchant 0 C, sont très critiques. Du givrage important a été signalé en cas de bruine ou de pluie, même par des températures de +80 à +140C.

Des plaques de verglas peuvent se décoller des ailes au moment de la rotation ou en cours de vol, ce qui risque d'endommager les moteurs de certains types d'aéronef, en particulier ceux dont les moteurs sont montés à l'arrière.

De plus, l'extrados et l'intrados d'ailes imprégnées de froid peuvent également se couvrir de givre lorsque l'humidité relative est élevée. Il s'agit là d'un type de contamination qui peut survenir lorsque la température est supérieure au point de congélation à des aéroports qui normalement n'utilisent pas de matériel de dégivrage ou qui ont rangé ce matériel pour la saison estivale. Ce type de contamination se produit généralement lorsque le carburant des réservoirs d'ailes est imprégné de froid et atteint des températures inférieures au point de congélation à cause de la basse température du carburant embarqué au cours de l'escale précédente ou à cause d'un vol de croisière à une altitude où les températures étaient basses, ou les deux, et que l'on effectue ensuite une descente normale dans une région où l'humidité est élevée. En pareil cas, du givre se forme sur l'intrados et l'extrados des ailes, dans la zone des réservoirs de carburant, pendant la durée de l'escale et le givre a tendance à se reformer rapidement, même lorsqu'on l'a enlevé une première fois.

Dans tous les cas, la glace ou le givre doivent être enlevés de l'extrados ou de l'intrados des ailes avant le décollage. Le décollage peut avoir lieu malgré la présence de givre sur l'intrados des ailes à condition qu'il soit effectué conformément aux instructions du constructeur de l'aéronef. La température du revêtement devrait être augmentée pour empêcher la formation de glace avant le décollage. On peut souvent obtenir ce résultat en ravitaillant l'aéronef avec du carburant plus chaud.

Liquides dégivrants et antigivrants

Chez les exploitants, c'est par l'utilisation de liquides FPD que l'on procède normalement au dégivrage. Il existe un certain nombre de liquides FPD que l'on peut utiliser sur les aéronefs commerciaux et, dans une moindre mesure, sur les aéronefs de l'aviation générale. Il faut se servir uniquement des liquides dégivrants et antigivrants que le constructeur approuve.

Bien que les liquides FPD soient très hydrosolubles, ils n'absorbent la glace ou ne la font fondre que lentement. Si du givre, de la glace ou de la neige adhère à une surface de l'aéronef, on peut y remédier au moyen d'applications répétées de quantités appropriées d'un liquide FPD. à mesure que la glace fond, le liquide FPD se mélange à l'eau, ce qui a pour effet de le diluer. Au cours de cette dilution, le mélange qui en résulte peut commencer à s'écouler de l'aéronef. Si toute la glace n'est pas fondue, il est nécessaire d'ajouter du liquide FPD tant qu'il n'aura pas pénétré jusqu'à la surface de l'aéronef. Une fois toute la glace fondue, le résidu du liquide consiste en un mélange de liquide FPD et d'eau à une concentration inconnue. La pellicule restante peut geler (commencer à se cristalliser) rapidement à la moindre baisse de température. Si l'on constate que le point de congélation de la pellicule résiduelle est insuffisant, il faut répéter la procédure de dégivrage jusqu'à ce que le point de congélation de la pellicule résiduelle puisse assurer la sécurité du vol.

La procédure de dégivrage peut être grandement accélérée si l'on utilise l'énergie thermique des liquides chauds et l'énergie physique des équipements de pulvérisation à haute pression, comme le veut la pratique courante.

Liquides de type I

Ces liquides dans leur forme concentrée contiennent au moins 80 % de glycol et on considère qu'ils sont « non épaissis » à cause de leur viscosité relativement faible. Ces liquides sont utilisés pour le dégivrage ou l'antigivrage, mais ils n'offrent qu'une protection antigivrage très limitée.

Liquides de type II

Les liquides de type II de la SAE ont des délais d'efficacité plus longs dans les précipitations et ils assurent une plus grande marge de sécurité s'ils sont utilisés conformément aux recommandations des constructeurs d'aéronefs.

Les essais en vol effectués par les constructeurs d'aéronefs de catégorie transport ont démontré que la plus grande partie des liquides de type II de la SAE s'écoule des surfaces portantes avant que la vitesse de rotation (Vr) ne soit atteinte, quoique certains gros aéronefs puissent subir une dégradation des performances et qu'une compensation puisse s'avérer nécessaire au niveau de la masse ou autre au moment du décollage. Ainsi, les liquides de type II de la SAE devraient être utilisés sur des aéronefs dont la vitesse de rotation (Vr) est supérieure à 100 noeuds. La détérioration risque d'être importante sur les avions dont la vitesse de rotation est inférieure à 100 noeuds.

Comme pour tout autre liquide dégivrant ou antigivrant, les liquides de type II de la SAE ne doivent être appliqués que si le constructeur de l'aéronef a approuvé leur utilisation, quelque soit la vitesse de rotation de l'aéronef. Les manuels des constructeurs d'aéronefs contiennent éventuellement des directives plus détaillées relativement aux liquides de type II de la SAE acceptables pour des types particuliers d'aéronefs.

Une certaine quantité de liquide résiduel peut demeurer sur l'aéronef pendant toute la durée du vol. Le constructeur de l'aéronef devrait avoir établi que ces résidus présents dans des zones stables du point de vue aérodynamique n'auront que peu ou pas d'effet sur les performances de l'aéronef ou sur sa pilotabilité. Toutefois, ces résidus devraient être enlevés périodiquement.

Les liquides de type II de la SAE contiennent au moins 50 % de glycol et possèdent un point de congélation minimal de -32 0C. On considère qu'ils sont « épaissis » à cause de l'ajout d'agents épaississants qui permettent au liquide de former une pellicule plus épaisse pouvant demeurer sur les surfaces de l'aéronef jusqu'au moment du décollage. Ces liquides sont utilisés pour le dégivrage (s'ils sont chauffés) et l'antigivrage. Les liquides de type II offrent une meilleure protection (délai d'efficacité) que les liquides de type I contre l'accumulation de givre, de glace ou de neige dans des conditions propices au givrage de l'aéronef au sol.

Ces liquides sont des antigivreurs efficaces en raison de leur viscosité élevée et de leur comportement pseudo-plastique. Ils sont conçus pour demeurer sur les ailes d'un aéronef au cours des opérations au sol ou pendant le remisage à court terme afin d'assurer une protection contre le givrage, mais ils sont également conçus pour s'écouler rapidement des ailes au cours du décollage. Lorsque ces liquides sont soumis à des contraintes de cisaillement, comme celles qui se produisent normalement pendant une course au décollage, leur viscosité diminue de façon importante, ce qui permet au liquide de s'écouler des ailes afin de nuire le moins possible aux performances aérodynamiques de l'aéronef.

Le comportement pseudo-plastique des liquides de type II de la SAE peut être altéré par un équipement de dégivrage ou d'antigivrage inadéquat ou par une mauvaise manipulation. Ainsi, certaines compagnies aériennes nord-américaines ont modernisé leur équipement de dégivrage et d'antigivrage, leurs installations d'entreposage du liquide, leurs procédures de dégivrage et d'antigivrage, leurs procédures d'assurance de la qualité et leurs programmes de formation afin de mieux répondre aux caractéristiques distinctes de ces liquides. Les essais démontrent que s'ils sont appliqués avec un équipement inadéquat, les liquides de type II de la SAE risquent de perdre de 20 à 60 % de leurs propriétés antigivrantes.

Les liquides de type II de la SAE ont été introduits en Amérique du Nord en 1985 et leur utilisation s'est généralisée dans les années 90. Des liquides semblables, mais dont les caractéristiques diffèrent légèrement, ont été mis au point, introduits et utilisés au Canada.

Liquides de type III

Le liquide de type III est un liquide FPD épaissi dont les propriétés se situent entre celles des liquides de type I et celles des liquides des types II/IV. Par conséquent, il assure un délai d'efficacité supérieur à celui du type I, mais inférieure à celui des types II/IV. étant donné ses caractéristiques d'écoulement, il convient aux aéronefs dont la course au décollage avant la rotation est plus courte. Cette caractéristique devrait en faire un liquide acceptable pour les aéronefs dont la Vr est inférieure à 100 nouds, à savoir pour les avions à turbopropulseurs qui assurent généralement des services de navette.

Il y a quelques années, on s'est rendu compte qu'il serait bon d'avoir un liquide de dégivrage/d'antigivrage qui aurait des délais d'efficacité plus longs que ceux des liquides de type I tout en ayant une viscosité inférieure à celle des liquides de type II ou IV et qui pourrait servir sur les aéronefs ayant de faibles vitesses de rotation. La SAE a approuvé une spécification dans l'AMS1428A concernant des liquides d'antigivrage de type III qui peuvent être utilisés sur les aéronefs dont la vitesse de rotation est de 100 nouds ou moins. En date de juillet 2004, un fabricant produisait un liquide qui répondait à toutes les exigences pertinentes et qui pouvait être qualifié de liquide de type III. Par conséquent, une nouvelle table des délais d'efficacité générique pour les liquides de type III a été produite cette année (2004), et elle se fonde sur les délais d'efficacité de ce liquide en question.

Liquides de type IV

Les liquides d'antigivrage de type IV marquent une avancée importante. Ces liquides répondent aux mêmes spécifications que les liquides de type II, tout en ayant des délais d'efficacité beaucoup plus longs. Des tableaux des délais d'efficacité sont disponibles pour les liquides de type IV et confirment ce qui précède.

Ce produit a une teinte verte. On pense qu'un produit vert permettra l'application d'une couche plus uniforme de liquide sur l'aéronef et réduira le risque que le liquide soit pris par erreur pour de la glace. Toutefois, comme ces liquides ne s'écoulent pas aussi facilement qu'un liquide conventionnel de type II, il faut bien faire attention d'utiliser assez de liquide pour obtenir une couverture uniforme.

Les recherches montrent que l'efficacité d'un liquide de type IV risque d'être fortement réduite si les bonnes procédures d'application ne sont pas suivies.

Tous les utilisateurs de liquides devraient s'assurer que de tels liquides sont appliqués uniformément et complètement et qu'une couche suffisante est présente, conformément aux recommandations du fabricant. Il conviendra de faire particulièrement attention au bord d'attaque de l'aile et du stabilisateur.

Renseignements supplémentaires

Pour de plus amples renseignements sur la contamination des surfaces critiques des aéronefs, veuillez consulter la trousse de formation préparée par Transports Canada Aviation et composée des vidéocassettes et des brochures intitulées « Dans le doute... Formation sur la contamination des surfaces critiques des aéronefs - Petits aéronefs, Gros aéronefs, et L'équipe au sol ». Il est possible de commander le tout au Centre de communications de l'Aviation civile. Le coût s'élève à :

Téléphone : 1-800-305-2059 ou
613 993-7284 (à Ottawa)