Document de travail
Le manque de pouvoir défini conformément au droit international pour les états côtiers d'intervenir en ce qui concerne les épaves qui constituent un obstacle à la navigation dans leur zone économique exclusive, qui mettent en danger les navires et leurs équipages, ont été particulièrement préoccupantes pour de nombreux États, particulièrement ceux qui bordent les principales voies navigables internationales.
Tout aussi préoccupant est le risque potentiel qui menace les environnements marins sensibles en raison des hydrocarbures et des marchandises qui restent à bord des épaves ainsi que les coûts associés au marquage et à l'enlèvement des épaves représentant un danger.
La Convention de Nairobi répond à ces préoccupations en permettant aux états côtiers d'intervenir lorsqu'une épave qui se trouve dans leur zone économique exclusive constitue un danger pour la navigation ou l'environnement tout en veillant à ce que les armateurs demeurent strictement responsables des coûts afférents au marquage et à l'enlèvement des épaves dangereuses. Les dispositions de la Convention au sujet de l'assurance obligatoire jusqu'aux limites établies dans la CLRMCM doivent faire en sorte que les états côtiers peuvent recouvrer une partie des coûts qu'ils ont encourus pour prendre les mesures nécessaires afin d'enlever l'épave de leur zone économique exclusive, même si l'armateur est insolvable.
Si la portée des dispositions de la Convention était élargie afin de comprendre les eaux intérieures et la mer territoriale du Canada, ces dispositions fourniraient une mesure de protection supplémentaire en exigeant que les armateurs maintiennent une assurance pour couvrir de tels coûts. Cette protection pourrait être particulièrement importante si on tient compte de la possibilité que le nombre de navires qui passeront dans l'Arctique canadien, dont l'environnement est fragile. L'Arctique est un territoire vaste et éloigné, où les défis à relever sont considérables pour quiconque veut entreprendre une opération d'envergure pour la récupération ou l'enlèvement d'épave. Une épave située dans les eaux intérieures ou la mer territoriale du Canada ou encore dans l'Arctique pourrait entraîner des coûts élevés s'il faut que le gouvernement lance des mesures d'urgence pour prévenir les dommages à l'environnement.
Le fait d'étendre la Convention aux eaux intérieures et à la mer territoriale du Canada pourrait également fournir à Transports Canada un outil supplémentaire pour traiter tout incident futur entraînant l'abandon d'un navire le long des côtes du Canada, ce qui pourrait représenter une menace environnementale ou avoir des conséquences néfastes sur l'industrie du tourisme ou d'autres intérêts économiques.
Ainsi, les propriétaires de navires de plus de 300 tonneaux de jauge brute seraient responsables de leur enlèvement, comme c'est le cas conformément à la LPEN, mais ils auraient également l'assurance que, grâce à la disposition sur les actions directes contre les assureurs, l'enlèvement est bien fait et non retardé ni négligé en raison d'un manque de fonds pour payer les coûts afférents à l'enlèvement.
L'incidence sur les armateurs des dispositions de la Convention de Nairobi devrait être minimale étant donné que les dépenses associées à l'enlèvement font partie des risques couverts par les polices courantes des clubs de protection et d'indemnisation13, qui assurent la plupart des navires marchands. La majorité des armateurs détiennent une assurance équivalente au niveau établi dans la CLRMCM et n'auraient donc pas besoin d'une couverture accrue. Bien que les armateurs demeurent responsables de tous les coûts excédant les limites assurables, l'assurance obligatoire devrait suffire dans la plupart des cas.
Les dispositions de la Convention semblent être généralement cohérentes avec la LPEN (c.-à-d. que l'armateur est responsable des coûts et que le ministre peut prendre des mesures d'intervention). Par contre, le prolongement de la Convention aux eaux intérieures et à la mer territoriale du Canada ajouterait de nouvelles obligations ou limites qui ne sont pas contenues dans la LPEN ou entraînerait des écarts entre les dispositions applicables aux eaux intérieures par rapport à la zone économique exclusive.
Par exemple, l'obligation contenue dans la Convention sur l'établissement d'un délai «raisonnable»14 remplacerait la disposition de la LPEN permettant au ministre d'immobiliser, d'enlever et de détruire toute épave s'il juge que les situations décrites dans la disposition sont présentes depuis plus de 24 heures. De plus, l'obligation contenue dans la Convention visant à informer l'armateur et l'État du pavillon avant de prendre des mesures pourrait entraver le droit du ministre d'intervenir rapidement.
La disposition de la Convention sur le fait de prendre seulement les mesures proportionnelles au risque et nécessaires pour enlever l'épave modifierait la discrétion que détient le ministre en vertu de la LPEN quant à l'immobilisation, l'enlèvement et la destruction de toute épave de la façon qu'il juge appropriée. La définition d'une épave contenue dans la Convention de Nairobi restreint également son application aux navires et à toute partie provenant d'un navire, alors que la LPEN permet au ministre d'intervenir lorsque la navigation est gênée, obstruée, difficile ou dangereuse par tout élément, qu'il s'agisse ou non de la partie d'un navire. Par exemple, le ministre pourrait, conformément à la LPEN, faire enlever un aéronef échoué qui représente un danger pour la navigation dans les eaux intérieures et la mer territoriale du Canada, mais il ne pourrait pas agir de la sorte selon la Convention lorsqu'un avion échoué représente un danger pour la navigation dans la zone économique exclusive.
[ Précédente : Aperçu ]
13 Les clubs de protection et d'indemnisation sont des associations d'armateurs qui se sont regroupés pour offrir une protection mutuelle contre les risques non couverts par les assureurs maritimes.
14 Alinéa 9(6)a) de la Convention de Nairobi.