Manuel de référence sur la gestion de la sécurité des ponts

Partie D – Inspection des ponts

3.1 – Portée

Le PGSP de la compagnie de chemin de fer devrait assurer l'efficacité du programme d'inspection des ponts. La compagnie de chemin de fer devrait clairement définir et documenter les différents types d'inspections à entreprendre sur ses ponts, y compris la fréquence, dans son PGSP.

Analyse de la section 3.1 – Portée

Un pont comportant des dommages ou une détérioration qui n'ont pas été détectés ou signalés peut gravement compromettre la sécurité ferroviaire. L'inspection et l'évaluation du pont constituent un processus à plusieurs niveaux, contrairement à de nombreux autres types d'inspection ferroviaire. L'évaluation d'un pont nécessite l'application des principes d'ingénierie par un ingénieur professionnel ou une personne compétence sous la direction d'un ingénieur professionnel, qui n'est généralement pas présent pendant l'inspection. Il est donc nécessaire qu'un rapport d'inspection fasse état de toute condition sur le pont qui pourrait mener à une réduction de la capacité, du lancement des travaux de réparation ou de la réalisation d'une inspection plus détaillée pour caractériser davantage la condition.

3.2 – Répertoire

La compagnie de chemin de fer devrait tenir un répertoire de tous les ponts situés sur son emprise et dresser une liste complète de tous les passages supérieurs de tiers sur son emprise.

3.2.1 – Ponts

Ce répertoire devrait comprendre à tout le moins les renseignements suivants :

  1. l'emplacement (p. ex., subdivision et point milliaire);
  2. les coordonnées géoréférencées (p. ex., longitude, latitude);
  3. l'obstacle que le pont permet de franchir (p. ex., plan d'eau, route, etc.);
  4. la hauteur maximale;
  5. la longueur totale;
  6. la cote du pont, qui peut être exprimée en fonction de la capacité de chaque pont ou de la capacité de la ligne selon la cote directrice du pont sur le tronçon de ligne;
  7. la date d'achèvement de l'évaluation du pont;
  8. l'entité, autre que la compagnie de chemin de fer, responsable de l'inspection et de l'entretien du pont;
  9. les renseignements suivants au sujet de chaque travée d'un pont :
    1. le type de superstructure,
    2. le type d'infrastructure,
    3. la longueur de la travée,
    4. l'année de construction,
    5. le type de tablier;
  10. les infrastructures du pont propices à l'érosion ou à une migration latérale des cours d'eau.

Si les points (f) et (g) ne font pas partie du répertoire des ponts de la compagnie de chemin de fer, leur emplacement doit figurer dans le PGSP.

3.2.2 – Passages supérieurs de tiers

La liste des passages supérieurs de tiers devrait à tout le moins indiquer l'emplacement et l'entité responsable de l'inspection et de l'entretien.

Analyse de la section 3.2 – Répertoire

Le répertoire peut être intégré sous forme d'annexe au PGSP ou par renvoi dans un document distinct et autonome.

3.3 – Types d'inspections

3.3.1 – Inspections visuelles

Une inspection visuelle est une inspection documentée effectuée par un ingénieur de pont ferroviaire ou un inspecteur de pont ferroviaire sous la direction d'un ingénieur de pont ferroviaire.

3.3.2 – Inspections spéciales

Le PGSP de la compagnie de chemin de fer devrait prévoir une procédure appropriée pour protéger la circulation après un accident ou pendant et après un phénomène naturel important qui pourrait avoir une incidence sur l'intégrité structurale du pont, et pour l'inspection subséquente de tout pont qui aurait pu être touché.

Parmi les phénomènes naturels importants, mentionnons les crues, les incendies, les écoulements glaciaires, les écoulements de débris, l'instabilité du sous-sol, l'instabilité des roches, l'effet des ruptures de barrages de castors et les séismes.

3.3.3 – Inspections sous l'eau

La compagnie de chemin de fer devrait se doter d'un programme d'inspection sous l'eau pour déterminer les ponts qu'il y a lieu d'inspecter, les éléments à inspecter et la fréquence des inspections sous l'eau afin d'offrir des garanties raisonnables de l'intégrité des fondations.

Le PGSP de la compagnie de chemin de fer devrait comprendre des dispositions pour les inspections sous l'eau de routine afin de détecter l'affouillement ou la détérioration des composantes du pont submergées et lorsqu'il est impossible d'inspecter les fondations en raison de la profondeur de l'eau ou d'une mauvaise visibilité.

La compagnie de chemin de fer devrait connaître les risques que posent l'affouillement, l'érosion et les dangers de stabilité des cours d'eau, y compris ceux associés aux fondations superficielles.

Analyse de la section 3.3.3 – Inspections sous l'eau

L'état des composantes d'un pont situées sous l'eau n'est généralement pas visible de la surface. Parmi les moyens permettant de déterminer cet état, il peut y avoir des moyens aussi simples que l'utilisation de toises depuis la surface, ou encore des inspections au moyen de plongées périodiques ou spéciales. Les technologies de pointe peuvent également fournir des appareils qui permettent de déterminer l'état des composantes d'un pont sous l'eau.

Il est admis que les ponts n'ont pas tous besoin d'une inspection sous l'eau, pas plus que toutes les composantes d'un pont au-dessus de l'eau ne nécessitent une inspection sous l'eau. La présente section vise à indiquer que si un ingénieur de pont ferroviaire estime qu'un pont est susceptible à des conditions qui nécessitent des inspections sous l'eau, des dispositions et des procédures doivent être mises en place.

3.3.4 – Inspection des broussailles et de l'état des canaux de drainage

Le PGSP de la compagnie de chemin de fer devrait prévoir des pratiques d'inspection pour surveiller l'état des broussailles et des canaux de drainage pour s'assurer qu'il est conforme au Règlement concernant la sécurité de la voie, ne compromet pas la sécurité du pont ou la sécurité ferroviaire et permet la tenue d'une inspection approfondie du pont.

3.4 – Calendrier des inspections des ponts

Le PGSP devrait comprendre les éléments suivants :

  1. une inspection visuelle de chaque pont en service au moins une fois par année civile, sans que s'écoulent plus de 540 jours entre des inspections successives;
  2. une inspection de chaque passage supérieur de tiers conformément au Règlement concernant la sécurité de la voie;
  3. une disposition selon laquelle les ponts doivent être inspectés plus fréquemment lorsqu'un ingénieur de pont ferroviaire détermine que cette fréquence d'inspection est nécessaire compte tenu de l'état constaté lors d'inspections préalables, du type et de la configuration du pont et du poids et de la fréquence de la circulation qui emprunte le pont;
  4. une exigence définie pour l'inspection spéciale d'un pont conformément à la section 3.3.2 de ce manuel de référence;
  5. une exigence selon laquelle tout pont qui n'accueille pas de circulation et n'a pas été inspecté conformément à cette section doit être inspecté, et le rapport de ladite inspection doit être examiné par un ingénieur de pont ferroviaire avant que la circulation ne puisse reprendre.

3.5 – Procédures d'inspection des ponts

  1. Le PGSP devrait préciser les procédures à suivre pour l'inspection des ponts individuels ou des catégories et des types de ponts ou y référer.
  2. Les procédures d'inspection des ponts doiventFootnote 6 être celles qui sont prescrites par un ingénieur de pont ferroviaire.
  3. Les procédures d'inspection des ponts devraient être conçues de manière à déceler, à rendre compte et à prévenir les détériorations et les défaillances avant qu'elles ne présentent un risque pour la sécurité ferroviaire.

3.6 – Registres d'inspection des ponts

  1. La compagnie de chemin de fer devrait conserver un registre de chaque inspection.
  2. Chaque registre d'inspection devrait être rempli à partir des notes prises durant l'inspection, complétées par des croquis et des photographies au besoin.
  3. Chaque registre d'inspection devrait préciser, à tout le moins, les renseignements suivants :
    • l'identification précise du pont inspecté (par exemple, les coordonnées géoréférencées);
    • la date à laquelle l'inspection a été effectuée;
    • l'identification et la signature écrite ou électronique de l'inspecteur;
    • le type d'inspection réalisée, conformément aux définitions des types d'inspections qui figurent dans le PGSP de la compagnie de chemin de fer;
    • une indication dans le rapport afin de savoir si un élément qui y figure exige l'examen critique ou accéléré d'un ingénieur de pont ferroviaire, et les restrictions imposées au moment de l'inspection;
    • l'état des composantes inspectées, qui peut être présenté sous forme d'un rapport sur l'état prescrit dans le PGSP de la compagnie de chemin de fer, ainsi qu'un récit descriptif nécessaire à l'interprétation exacte du rapport.
  4. La compagnie de chemin de fer devrait préciser l'emplacement des registres d'inspection des ponts.
  5. La durée de conservation des registres d'inspection ne devrait pas être inférieure à cinq ans après le parachèvement de l'inspection, ou jusqu'au parachèvement des deux inspections suivantes du même type, selon la période la plus longue des deux.

Analyse de la section 3.6 – Registres d'inspection des ponts

Item d.

Il existe plusieurs raisons pour lesquelles il convient de conserver les registres d'inspection des ponts pendant plusieurs années ou plusieurs cycles d'inspection. Premièrement, une comparaison des rapports successifs peut révéler des taux d'accélération de la détérioration ou de la dégradation des composantes d'un pont. Deuxièmement, une vérification ou un examen de l'efficacité du programme d'inspection des ponts exige de comparer des rapports d'inspection préalables à l'état effectif d'un pont faisant partie de la vérification. Cela fournit des renseignements précieux qui permettent de déterminer l'efficacité du PGSP.

3.7 – Examen des rapports d'inspection des ponts

Le PGSP de la compagnie de chemin de fer devrait préciser le processus par lequel les rapports d'inspection des ponts sont examinés par un ingénieur de pont ferroviaire.

Cet examen a pour objet :

  1. de s'assurer que les inspections ont été réalisées conformément à la fréquence pertinente et aux procédures prescrites;
  2. d'évaluer si des points figurant dans le rapport constituent ou présentent un risque possible pour la sécurité;
  3. de prescrire des modifications aux procédures d'inspection au sujet de ce pont en particulier;
  4. de prévoir les réparations ou les modifications nécessaires au maintien de l'intégrité structurale du pont;
  5. de déterminer le besoin d'un examen de niveau supérieur.

Le temps entre l'inspection et l'examen ne devrait pas être supérieur à 365 jours. L'examen devrait être consigné et préciser au minimum le pont examiné, la date de l'examen, l'ingénieur de pont ferroviaire responsable, et les conclusions et les recommandations issues de l'examen.

Toutefois, un ingénieur de pont ferroviaire doitFootnote 7 examiner l'état de défaillance potentielle imminente durant les inspections du pont avant le passage du prochain train.

3.8 – Examen de niveau supérieur

Un examen de niveau supérieur est réalisé par un ingénieur de pont ferroviaire pour assurer la sécurité d'un pont pour son usage prévu. L'examen peut comprendre une évaluation de l'ensemble des inspections, des évaluations, des rapports, des renseignements et des circonstances connus relatifs à un pont. Des inspections ou des évaluations supplémentaires peuvent être nécessaires pour achever l'examen de niveau supérieur.

Les registres d'un examen de niveau supérieur devraient préciser au minimum le pont évalué, la date de l'évaluation, l'ingénieur de pont ferroviaire responsable, et les conclusions et les recommandations issues de l'examen de niveau supérieur.

3.9 – Détermination des dangers des ponts

  1. La compagnie de chemin de fer devait élaborer, mettre en œuvre et maintenir des processus pour la détermination des enjeux et des préoccupations pour la sécurité, afin d'évaluer et de classifier les risques, ainsi que mettre en œuvre les stratégies de contrôle nécessaires.
  2. La compagnie de chemin de fer devrait connaître les risques que posent l'affouillement, l'érosion et la migration latérale des cours d'eau. La compagnie de chemin de fer devrait mettre en œuvre des mesures visant à assurer la sécurité ferroviaire sur les ponts pendant et après des phénomènes météorologiques violents.
  3. La compagnie de chemin de fer devrait connaître les risques que présentent la charge et la fatigue causée par la déformation sur des ponts d'acier. Elle devrait tenir à jour la documentation des ponts où une fissuration par fatigue a été observée. Au besoin, la compagnie de chemin de fer devrait mettre en œuvre des mesures d'atténuation pour réduire la possibilité de défaillance en raison de la croissance de la fissuration par fatigue.

Analyse de la section 3.9 – Détermination des dangers des ponts

Point b.

Les phénomènes météorologiques violents qui sont à l'origine d'inondations ou de périodes de fort débit endommagent ou emportent fréquemment les ponts ferroviaires et les ponceaux, et cela pourrait compromettre la sécurité ferroviaire lorsque les risques ne sont pas reconnus ou qu'ils ne sont pas atténués de façon appropriée.

Les aspects qui devraient être pris en considération incluent, sans toutefois s'y limiter, ce qui suit :

  • déterminer les ponts qui sont vulnérables à l'affouillement ou à la migration latérale des cours d'eau;
  • repérer les régions qui sont reconnues comme étant sujettes aux inondations ou aux périodes de fort débit;
  • cerner les ponts qui ont subi des dommages à la suite d'un phénomène précédent;
  • identifier les ponts essentiels pour déterminer si les inondations ou les périodes de fort débit prévues peuvent entraîner des conséquences ainsi que la date et le lieu;
  • connaître l'état de la neige accumulée et les répercussions du ruissellement du printemps;
  • connaître les effets des barrages de l'écoulement glaciaire et de l'accumulation d'autres débris sur la substructure;
  • élaborer et mettre en œuvre des méthodes acceptables visant à protéger les ponts avant, pendant et après une inondation ou une période de fort débit;
  • concevoir et mettre en œuvre des technologies de surveillance qui pourraient prévoir les défaillances causées par les répercussions d'un phénomène;
  • utiliser des sonars, des capteurs et d'autres technologies intelligentes pour surveiller les ponts où l'affouillement serait dangereux;
  • définir les exigences liées aux compétences et à la formation des inspecteurs pour surveiller les ponts pendant un phénomène;
  • élaborer des processus visant à surveiller les phénomènes météorologiques violents;
  • définir la fréquence et la portée des inspections qui doivent être réalisées pendant une inondation ou une période de fort débit;
  • déterminer les méthodes considérées comme acceptables pour effectuer des inspections sous l'eau lorsqu'il est impossible de recourir à des plongeurs.

Point c.

Des renseignements concernant la fatigue des ponts ferroviaires se trouvent dans le « Manual for Railway Engineering » de l'AREMA, volume 2. Il est admis que certaines compagnies de chemin de fer emploient d'autres méthodes et normes.